La Bretagne du Sud, étape 2 : de la caillasse !

  Résumé des épisodes précédents
On a bien parlé de la Loire en Bretagne. A présent, il est grand temps de parler de caillasse.

  La Bretagne du Nord, étape 2
Après La Baule et ses immeubles, son casino, sa thalasso et ses gens seuls sur des bancs, j'arrive dans l'amour sauvage ; symbiose de mon imminent passage par la Côte d'Amour (englobant l'ensemble du littoral de la presqu'île de Guérande) et la côte sauvage (du Croisic).
Pour se mettre dans le bain, un petit passage au Pouliguen où se trouve la grotte des Korrigans. Et qu'est-ce que les Korrigans ? Hein ?

La réponse en carte postale

Impossible d'aller dans la grotte aujourd'hui car la marée est haute. Tant pis, je me contente de relire la légende qui accompagne le lieu.
"Il y a plus d'un siècle, une vieille femme au regard noir interpella un paludier alors qu'il revenait de sa dure journée de labeur. La nuit était froide et le brave homme lui offrit l'hospitalité qu'elle mendiait. Le paludier n'était pas très fortuné et partagea son maigre souper quand, au premier coup de minuit, chose miraculeuse se passa : la vieille femme en haillons se transforma en une merveilleuse créature, couverte d'or et de diamants. 'Reine des Korrigans, pour te servir ! A toi parce que tu t'es montré généreux, j'ouvrirai la porte de ma grotte, emplie de richesse des cités englouties'. A une condition : descendre à la grotte la prochaine nuit de pleine lune et prononcer la formule magique qu'elle lui confia...
Sur ces mots, elle disparut, laissant en gage de sa bonne foi un somptueux plateau d'argent qui, dès lors, trois fois par jour, se remplit de mets délicieux...
La nuit venue, sous l'oeil bienveillant de la lune, le paludier descendit à la fameuse grotte et suivant les consignes de la Reine, pénétra le monde mystérieux des Korrigans. Au sommet d'une montagne de trésors et de richesses, la reine l'accueillit, entourée d'une farandole de petits êtres burlesques, qui se livraient aux plaisirs de la débauche. Pour le récompenser de son courage, la Reine lui ordonna de se servir, d'emporter chez lui tout ce qu'il désirait... à une condition : qu'il soit de retour chez lui avant la première lueur du jour... Ébloui par autant de richesses, le paludier emplit un coffre de pièces d'or, qu'il porta avec peine jusqu'à sa modeste demeure, puis revint, le chargea d'écus d'argent, puis retourna encore, et ainsi de suite jusqu 'au... premier rayon du jour. Trop gourmand, il ne vit pas la lune disparaître. trop tard, les pièces d'or se changèrent en misérables cailloux.
Chaque nuit de pleine lune, le pauvre paludier tenta de retourner dans la grotte mais la porte restait close."   Légende bretonne

Si nous transposions cette légende au goût actuel, qu'est-ce que cela donnerait ?
Peut être ceci :

"L'usine Kléber de Toul s'est transformée en véritable camp retranché depuis que certains ouvriers ont décidé de bloquer l'usine. Un feu de pneumatiques brûle en permanence devant le site où une quarantaine de personnes protestent contre le plan social engagé par Michelin. Le groupe avait annoncé en octobre dernier sa volonté de fermer le site de Toul courant 2009, supprimant au passage 826 postes. (...)
Le président du groupe pneumatique a par ailleurs fait état 'de résultats en grand progrès par rapport aux années précédentes'. Michelin a engrangé 774 millions d'euros de bénéfices en 2007. Michel Rollier estime que 'l 'entreprise va bien'."  Alexandre Panizzo, Le Figaro, 15/02/2008

Aaaah, comme disait ce brave Coluche : "Eh ben, ils vont être contents les pauvres de savoir qu'ils habitent un pays riche !"
Je me demande combien de bénéfices doit faire une société pour ne pas centraliser ses activités ? Comment se fait-il que l'Etat n'intervienne pas pour stopper ce processus de regroupement des sociétés au détriment du pluralisme et de l'activité régionale ? En a-t-il seulement les moyens face au pouvoir des actionnaires ? Et finalement, l'Etat a-t-il le moindre pouvoir ?

Je quitte Le Pouliguen et sa grotte dans laquelle je n'ai pas mis les pieds. J'atteins...

La Côte sauvage du Croisic

"De même que la presqu'île de Quiberon, la presqu'île granitique du Croisic n'a pas toujours été rattachée à la terre ferme. Le rivage sud du Massif armoricain est jonché d'îles et d'îlots granitiques, dont certains ont été reliés au continent par des flèches sédimentaires (les tombolos) construites par les courants côtiers. C'est un processus d'ensablement qui a donné naissance à un isthme étroit, barrage naturel formé de dunes anciennes."  EDITIONS ATLAS

Outre cette côte déchirée,
ce paysage océanique revêt un charme certain
par ses couleurs douces et ses différentes nuances de bleu.

Ouais OK, d 'accord ! C'est pas évident sur cette photo.

Faut y'être, tu vois ! Quand t'es d'dans, ça t'pète à la gueule, tu comprends ! Tu bouffes de l'iode à fond, ouais ! Et pis, t'as tout ce sauvage qui t'mange les yeux ! Tous tes sens sont en éveil, tu comprends ?! T'es sensible au moindre grain de sable ! T'as envie de le prendre dans tes bras, le grain de sable, et de lui parler, tu comprends ?! T'es dans les rochers, t'as cette immensité océanique devant toi ! Tu t'dis que de l'autre côté, c'est les States, tu vois ! Le rêve américain, ouaaaiiiss ! Le truc de ouf ! Putain, mais... quand je vois ça, moi, tu vois, j'ai envie de chanter du Bruce Springsteen à donf, quoi, merde !!!!

Bon, allez, les États-Unis, ça sera pour un autre jour.
En attendant, pour rejoindre Vannes et le Golfe du Morbihan, je passe par...

Guérande et son moulin du Diable

Tu ne peux pas le visiter car il est situé dans un champ
qui s'avère être une propriété privée.

Puis par...

Guérande et ses marais salants

"Ils s'étendent sur 2 000 hectares répartis en deux bassins, et forment un immense quadrillage délimité par des fossés. La mer irrigue le marais par un canal ou étier au rythme quotidien des marées. Tous les 125 jours, en période de saunaison, le paludier, grâce à une trappe, admet l'eau dans un réservoir de décantation (vasière). De là, sous l'effet d'une légère dénivellation, l'eau est mise à circuler dans la saline en traversant une suite de bassins aménagés dans l'argile. Sous l'action du soleil et du vent, l'eau s'échauffe, s'évapore et devient saumure (augmentation de sa teneur en sel). Dans les oeillets, bassins de 70 m2, où elle parvient finalement, le sel se cristallise. (...)"  LE GUIDE VERT MICHELIN

Allez, soyons honnêtes : les marais salants, niveau paysage, ça casse pas trois pattes à un canard ! C'est un peu de flotte dans des sortes de bassin au milieu de touffes d'herbes hautes. Mais, en prenant de la hauteur, c'est autre chose : les marais salants vu du ciel !

Personnellement, le truc qui m'a interpellé, c'est le calme de ce lieu d'activité.
Certes, il y a des oiseaux (qui bullent au milieu des bassins en se demandant ce qu'ils font là) et il y a les paludiers (j'en ai pas vu personnellement car c'est pas l'époque). Il y a aussi des camions garés à côté de certains bassins.

A l'intérieur, tu as, généralement, une femme cernée par des paquets de sel de toutes les tailles. Toute la journée, elle est là, dans son cametare, au milieu des marais, cernée par le sel ! Remarque, elle est au grand air (même si c'est salé) ! Elle a pas son chef sur le dos sans arrêt qui lui dit de vendre plus de sel ! Elle est pas emmerdée par le téléphone puisqu'il n'y a pas de réseau ! Pas de clients chiants car ces derniers préfèrent acheter leur sel en grande surface ! Je me demande ce que cela rapporte et qu'est-ce qu'elle peut raconter à la maison quand elle rentre le soir. Finalement, peut être que ce sont ces femmes des camions à sel des marais salants de Guérande qui ont inventé toutes ces légendes bretonnes pour passer le temps...

Allez hop ! Je quitte les marais pour rejoindre la Nationale 165 et atteindre Vannes.

... où je ne m'arrête pas.

Pas le temps !

Je passe ensuite à Auray...

...où je ne m'arrête pas non plus !

Je quitte la Nationale pour prendre la direction de Locmariaquer, petite ville située à l'entrée du Golfe du Morbihan, en passant par :

MA POULE !!!

et

AL PACINACHE dans

Tu vois, on parlait des States tout à l'heure, eh ben on y est, là ! Krach de 1929, Scarface... Hein ? Alors ! Non ?!
J'arrive à...

LOCMARIAQUER

Au bout de la jetée, sur le port, on découvre une magnifique vue sur le Golfe du Morbihan qui, d'après la légende, possède autant d'îles que de jours dans l'année. Oh, eh ! Je les ai pas comptées, mais faut pas pousser non plus, hein ! Disons simplement que cette "petite mer" ("mor bihan" en breton) est parsemée d'îlots et d'îles fleuris sur une surface d'environ 132 km2. Seuls une quarantaine d'entre eux sont habités.
Le Golfe est séparé de l'océan par un étroit passage de 900 mètres, s'ouvrant entre la pointe de Kerpenhir et le village de Port-Navalo.

Passage symbolisé par
Notre-Dame-de-Kerdro
(kerdro signifie "bon retour" en breton)

"Trois bateaux quittaient Locmariaquer, en saluant, selon la tradition, la Vierge de Kerpenhir. Le capitaine du dernier bateau vit sa femme qui, sur le rivage lui faisait signe de rentrer. Il obéit, et de retour au port, apprit qu'elle n'était pas allée à la pointe, mais simplement à l'église pour demander à la Vierge de protéger le voyage de son mari. Cependant, dans la nuit, une grosse tempête se leva et les deux autres bateaux se perdirent corps et biens. La Vierge avait exaucé les prières de l'épouse. La statue de Notre-Dame de Kerpenhir, détruite pendant la guerre, fut relevée en 1962 par les habitants de Locmariaquer en reconnaissance de sa protection contre les bombardements."  Légende bretonne

Mais Locmariaquer est surtout réputée pour son ensemble de mégalithes, comme La Table des Marchands, lesTumulus d'Er Grah, de Mané Lud, de Mané er Wroeg et, bien sûr, l'incontournable...

GRAND MENHIR BRISé

20 mètres de long pour un poids de 280 tonnes !
C'est la plus grande pierre jamais travaillée par l'homme préhistorique.
Il est grand, il est brisé : c'est le grand menhir brisé !

Eeeeh oui : je te l'avais dit en titre que l'Etape 2 de la visite de la Bretagne du Sud serait consacrée à la caillasse. Et tu vas pas être déçu ! Tu vas en avoir du cailloux, tiens ! Car nulle part au monde on ne rencontre une aussi grande concentration de monuments mégalithiques que sur ce segment de côte qui sépare Erdeven de Locmariaquer. La référence en la matière, la super-capitale de l'alignement, le Las Vegas de l'allignements est sans conteste...

CARNAC

"Depuis l'Antiquité, le mystère des alignements de Carnac a inspiré tant de superstitions, de légendes  -comme celle de saint Cornély transformant en pierres les soldats romains qui le poursuivaient-  et d'explications fantaisistes que Gustave Flaubert, au XIXème siècle, a pu remarquer avec ironie : "On a écrit plus de stupidités sur Carnac qu'on n'y compte de pierres levées."
Si le site, comme l'attestent ses tumulus, fut incontestablement un lieu de sépulture, l'orientation des alignements, correspondant au lever et au coucher du soleil à des dates précises de l'année, ainsi que l'existence de menhirs troués, destinés à laisser passer certains rayons solaires, semblent indiquer que Carnac fut aussi un immense calendrier, lié aux travaux agricoles et aux rites culturels." LES 100 PLUS BELLES BALADES EN FRANCE

    

"L'homme est présent en Bretagne depuis quelques 600 000 ans. A l'homo erectus qui domestique le feu vers 450 000 avant J.C. succède, vers 35 000 avant J.C., l'homme 'moderne', chasseur-cueilleur nomade qui se sédentarise progressivement. Vers 7000 avant J.C., les agriculteurs du Proche-Orient colonisent l'Europe. Vers 5000 ans avant J.C., l'océan Atlantique stoppe net leur progression. Arrivés à la fin de la terre (Finistère), ils vont remplacer les communautés locales et prendre possession du sol. Et voici que pour enterrer leurs morts, ils élèvent des mégalithes, des 'grandes pierres'. (...) Un mégalithe peut peser plus de 300 tonnes. Le déplacer nécessitait donc le concours de plusieurs centaines de personnes. Soit on faisait rouler la pierre sur des rondins (jusqu'à 10 km), soit on la plaçait sur un radeau pour descendre la rivière ou la baie."  LE GUIDE VERT MICHELIN

    

Les plus vieux mégalithes de Carnac datent d'environ 5000 ans avant notre ère, soient deux fois plus anciens que les pierres de Stonehenge, le palais de Cnossos ou les pyramides d'Egypte. Alors t'as qu'à voir. Il semble bien que les alignements soient la première architecture d'Europe.

Je me pose cinq minutes pour regarder le soleil tomber derrière ces pierres hors d'âge et hors du temps en me disant : "Mais, bordel : ils n'avaient donc rien d'autre à foutre qu'à trimballer des pierres ces gens-là ?! Hein ?!"
En même temps, c'était ben eux les plus heureux : pas d'augmentation d'essence ; pas baisse du pouvoir d'achat ; pas de licenciements abusifs ; pas obliger de manger 5 fruits et légumes par jour ; ils pouvaient fumer dans les bars ; et surtout, pas d'interminables questionnements sur "Comment je vais m'habiller ce soir pour aller manger au resto ?"
Non ! Ils étaient bien peinards à secouer du caillou, peut être même en se disant : "Dire qu'il y a de cons qui vont venir les visiter dans 5000 ans en se demandant ce que l'on a bien voulu faire !"
Sacrés eux, tiens ! Chapeau bas, messieurs les hommes "modernes" ! Tiens, le super César d'Honneur (ils sont cons aux César quand même), plutôt que de le refiler à l'insipide Jeanne Moreau, je te le remettrais à tous ces gars qui ont transporté de la caillasse, moi, tiens !? Merde alors !

J'arrive à la fin de la journée. Il me faut à présent rejoindre au plus vite Quiberon pour voir le soleil se coucher sur l'océan.

C'est chose faite !

      

Reste plus qu'à trouver un hôtel...

Comments

[Jénorme]

Rendez-vous est pris. A bientôt Lionel !

[lionel]

Forcément, si tu viens à Guérande en hiver, il faut pas t'étonner que l'activité soit "molle"!

Repasse en été, lorqu'il fait beau, et tu nous verras dans les marais.

Bon voyage

lionel