La Baie de Somme
Résumé des épisodes précédents
Nous sommes à Saint-Valéry-sur-Somme. En plein mois d 'avril, hier soir, il neigeait. La question se pose : et demain ?
De nos jours, avant l'apocalypse
Matin. 8 heures environ. Muni d'une bonne casquette en plomb à base de bières de la veille, j'ouvre... j'appuis sur le bouton qui ouvre le store métallique de la chambre d'hôtel. Et voici qu'apparaît face à mon regard embué cette vision sommaire... sommenante... sommeillante... Comment nomme-t-on un truc qui est relatif à la Somme ? Ouais bon. Le store se lève tel un rideau de théâtre pour laisser apparaître à mon regard embué ceci :
"Cora et Bertrand contemplaient la Baie soumise au reflux, alors que réapparaissaient les frontières des prés salés et l'avant-garde des bancs de sable. Le paysage se modifiait très vite, et sa modification s 'accompagnait de celle des nuages qui déferlaient vers l'horizon où les rais d'un soleil intermittent les éclairaient par saccades. Une lueur opalescente conquérait l'espace. Le ciel et la mer se rejoignaient et s'uinissaient en une seule teinte."
Robert Mallet, Les rives incertaines
Je me dirige vers la salle de bain au sol décoré de galets. Un coup de gant sur la tronche.
J'enfile un slip, un fute, un T-shirt adéquate...
...et je descends retrouver Sophie et Nick.
Dans la salle du petit déj', de grandes vitres nous laissent apercevoir cela...
Edgar Degas est né le 19 juillet 1834 à Paris. Dès 129 ans, il exécute des copies de dessins et de tableaux qu'il étudie au Louvre. Il fera plusieurs voyages en Italie dans les années 1850. Dans les années 1860, il fait la connaissance de peintres impressionnistes, tels que Cézanne, Renoir, Sisley, Monet et Pissarro. En 1872, en fréquentant les coulisses de l 'Opéra, il peint de nombreuses toiles.
Après un séjour en Nouvelle-Orléans, il est de retour à Paris en 1874 où il participe à la première exposition des Impressionnistes. En 1881, il modèle sa première figure en cire, "La jeune danseuse". Il souffre de problèmes de vue, mais continue à peindre selon des techniques diverses. Lorsqu'il se rend à Montauban en 1887 pour voir les oeuvres d'Ingres, il est presqu'aveugle ; mais décide d'entamer une collection des oeuvres du peintre ainsi que certaines de Courbet et Delacroix.
Edgar Degas finira ses jours à Saint-Valéry-sur-Somme dans une totale solitude le 27 décembre 1917.
Ben ouais ! Mine de rien, tout m'intéresse ce matin, mais je mélange un peu tout : cette femme seule et boitillante, le peintre Degas, le sable, la mer, la confiture, le jambon, le café, la baie, Picon, neige,...
Je regagne ma chambre pour un lavage de dents.
Mon regard se pose à nouveau sur le paysage qui fait face à l'hôtel.
Ben dis don', c'est t'y pas qu'on aurait l'beau temps en plus de ça ?!
Allez hop : on s'casse de là !
Dans le hall, je fais le plein de prospectus avec une petite préférence pour celui-ci.
Puis nous allons arpenter les rues déneigées de Saint-Valéry-sur-Somme.
SAINT-VALERY-SUR-SOMME
Le long des quais
par Jénorme et Gamain
C'est par ici que, prisonnière des Anglais, Jeanne d'Arc (eh ouais, encore !)
traverse la ville pour rejoindre Rouen en 1430.
La digue au loin
et ses "rives incertaines"
par Jénorme et Boudin
Comme les nommait le poète Robert Mallet.
Egalement essayiste, on lui doit quelques citations,
notamment celle-ci :
"Les bonnes idées n'ont pas d'âge,
elles ont seulement de l'avenir".
Le port et ses "sauterelliers"
par Jénorme et Mozin
Ici, on pêche la "sauterelle" (une crevette grise savoureuse),
la coquille Sain-Jacques, l'encornet et de nombreux poissons plats,
comme la sole, le carrelet, la raie, la lotte.
On peut également pêcher des anguilles et ramasser des coques.
La gare du train à vapeur de la Baie de Somme
Ce train circule à 20 km/h entre le Crotoy, Noyelles-sur-Mer, Cayeux-sur-Mer et Saint-Valéry-sur-Somme, permettant de découvrir toute la baie. Tu as également la possibilité d'assister au coucher du soleil tout en mangeant un repas typiquement picard à bord du train.
Comme cela fait longtemps que le soleil est levé et que, de toute façon , le train à vapeur ne roule pas, nous privilégions la visite d'un bureau de presse pour acheter les journaux qui expliquent tout l'élan de liberté sportive qui accompagnera la flamme olympique de passage à Paris...
Sans oublier, bien évidemment, comme à chaque destination, d'acheter quelques cartes postales du cru.
C 'est par celles-ci que j'apprends que la Baie de Somme accueille des phoques. Eh ben ouais, mon gars !
Ben merde !
Cela mérite quelques explications.
Au large de la Baie de Somme, on peut admirer quelques bancs de phoques veaux marins. Leur présence est attestée depuis la première moitié du XIXème siècle. Mais la chasse intensive, le développement de la navigation et les destructions occasionnés par les pêcheurs ont fait chuter leur effectif au début du XXème siècle.
Entre 1979 et 1983, six à huit phoques sont de nouveau observés, mais il faudra attendre 1986 pour pouvoir comptabiliser une petite colonie de 10 à 15 individus. Reproductrice depuis 1994, celle-ci compte aujourd'hui 100 à 150 individus (veaux marins et phoques gris), vivant en permanence sur la côte picarde.
On peut observer les phoques depuis la côte, en particulier depuis la pointe du Hourdel. Ils se vautrent à marée basse sur les 'reposoirs' et les 'microfalaises' de sable qui bordent l'estuaire.
C'est au printemps, après une gestation de sept mois, que naissent les jeunes phoques veaux marins : deux bébés par an. L'animal, qui atteint deux mètres au maximum pour un poids de 150 kg, possède un museau très court et un pelage gris clair semé de taches sombres. Il nage avec les pattes arrières et se déplace au sol en rampant sur le ventre. Une recommandation importante : ne jamais les approcher à moins de 300 mètres, leur survie en dépend.
PETITS COMPARATIFS
censés te permettre de reconnaitre un phoque
Forts de ces instructions, nous arrivons à la pointe du Hourdel.
La Baie de Somme apparaît ici dans son intégralité. Nous sommes à l'endroit même où la Somme vient se fondre définitivement dans la Manche après s'être prélassée dans cette baie, classée parmi les plus belles baies du Monde. La météo y est instable, ce qui rend la lumière étrangement changeante.
En errant sur le sable,
je comprends mieux l'attrait des peintres pour cette région.
La baie de Somme, par Daubigny
Oui, bon, c'est vrai, sur ces photos, on ne retrouve pas cette lumière "teintée de rose, d'opale, de gris ou d'or" dont parle le Guide Vert Michelin, mais c'est marée basse. Et puis, il y a beaucoup de vent, ça caille et le ciel est gris des restes de neige de la veille. Ce n'est donc pas aujourd'hui que nous verrons la mer se confondre au ciel.
On n'aura vu des galets, on n'aura vu du sable ; mais pas un seul phoque,
malgré les recommandations d'un panneau à l'entrée de la plage.
Poursuivons notre chemin sur la côte d'Opale...
Nous arrivons à Cayeux-sur-Mer, qui tient son nom des galets ("cailloux" en picard). Une sculpture étrange face aux plages semble vouloir le rappeler.
"Leur ramassage est une activité ancienne. Ils sont principalement utilisés dans l'industrie,
où ils sont broyés pour des usages divers : émeri, filtrants...
Le galet bleu, le plus rare, est utilisé pour la fabrication de la porcelaine."
Le Guide Vert Michelin
Il est vrai que l'on remarque des tonnes de galets un peu partout, encerclant littéralement la petite cité et la séparant de la mer. La raison est simple : les grandes marées s'annoncent fortes dans les heures à venir.
Le doute et la solitude des cette cité en hors saison proposent ainsi un tableau gris inquiétant, dominé par la silhouette austère du phare de Brighton...
...sur lequel de grands coups de vent s'abattent pour soulever quelques filets de poussières, dignes des villes de western américain.
Hein ? Oui, je sais, il n'y a pas de phare dans les western américains, mais je m'en fous, j'avais envie d'écrire ça.
Et puis de toute façon, je mélange tout aujourd'hui. Je te l'ai dit lors du petit déjeuner au début de ce billet.
Il est grand temps de quitter la Côte d'Opale pour rejoindre les falaises normandes.
OUIIIII PARTIIIRRRR !