QUITTONS LA FRANCE POUR... Mancha et Aragon (Espagne)
Dans le précédent épisode, nous avions vu qu'excédés par les remous de la politique française et les quatre saisons de Vivaldi, Maître Arnaud, Yan et Jénorme avaient décidé de quitter la France pour se rendre en Espagne, et plus précisément à Madrid.
Cette destination allait-elle être suffisamment lointaine pour contourner les turpitudes françaises ?
Quand soudain, ne voilà-t-il pas...
J'entends déjà au loin un gars (ou une fille, je vois pas bien d'ici) dire :
LE GARS (ou la fille ) : "- Ouah eh putain les mecs, ils quittent la France pour aller en Espagne !? Putain c'te loose ! J'croyais qu'ils allaient partir à l'autre bout du monde, sur une île ou je-sais-pas-où !!!! Putain, eh oh les mecs là eh hein !"
Certes, pourquoi pas, mais dans le même temps, je t'emmerde !
Ne taton (oui, en un seul mot) jamais dit que l'important n'était pas le lieu, mais ce que l'on pouvait y trouver, parfois même au plus profond de soi ? Hein ? Ne taton (toujours en un seul mot) jamais dit que l'essentiel n'était pas l'objectif, mais le parcours pour y parvenir ? Hein ?
Et puis, secondo, as-tu remarqué ce magnifique titre, digne des plus grandes séries américaines des années 1970-1980 ? Mancha et Aragon ! On dirait le nom de deux détectives qui enquêtent toujours sur des affaires judiciaires bien pourries, style t'sais, l'autre là, qui... ouais ! Ou encore un titre de film américain bourré de bonnes intentions, comme...
LE PITCH : N
BREF !
Alors,oui, bien sûr, allons-y, nous aurions pu nous rendre dans un de ces lieux où ne parviennent plus un seul souffle de vie afin de nous déconnecter de ce bas monde politique fait d'hypocrites, de menteurs, de pervers narcissiques et autres corbeaux de mauvaise augure qui planent et tournent autour de nous, tels des requins affamés par le pouvoir et l'argent facile. Nous aurions pu, par exemple, comme le recense le site "Les 33 plus beaux lieux abandonnés dans le monde", nous rendre à...
Angkor Wat, Cambodge Craco, Italie
Disneyland abandonné, Bejing, Chine Forts de la mer Maunsell, Angleterre
Hôtel Del Salto, Colombie Nara Dreamland, Japon Keelung, Taïwan
Maison du Parti Communiste, Bulgarie Monastère abandonné, Forêt Noire, Allemagne
Les restes du Pégasus, Antarctique Sud-Ouest de la Floride, Etats-Unis
Usine de roquettes, Russie SS Airfield, Australie
PHOTOS : LES 33 PLUS BEAUX LIEUX ABANDONNéS
Toujours est-il que la question se posait toujours : "Mais à quel saint se vouer ?"
Yan semble être le plus atteint d'entre nous. Après ces deux journées et deux nuits dans la capitale espagnole Madrid, il décide sur un coup de tête d'il-y-a quatre mois de partir pour l'Equateur s'occuper d'animaux.
Attention,
dialogues à couper au cordeau !
YAN : "- Je ne peux pas revenir en France maintenant ! Toutes ces histoires politiques me perturbent. J'ai besoin de partir loin.
MAITRE ARNAUD : "- Oui, t'es gentil, mais Madrid, c'est quand même loin de Bayonne, non ?
YAN : "- Sans doute, mais non. Plus loin il faut que j'aille.
JENORME : "- T'as ton passeport ?
YAN : "- Oui. Par contre, je n'ai pas pris mes médicaments contre la chiasse.
MAITRE ARNAUD : "- Mais tu sais où tu vas ?
JENORME : "- T'as ton passeport ?
MAITRE ARNAUD : "- Tu connais l'Equateur un peu siensiensien siensiensien c'est rigolo Lol mdr TKT ?
YAN : "- Je verrai bien une fois là-bas !
JENORME : "- T'as ton passeport ?
Maitre Arnaud avait raison. L'Equateur, comme ça de nom, on croit savoir, mais non !
L'EQUATEUR
Où est-ce que quoi ?
"Coincé entre la Colombie et le Pérou, l’Équateur, ce petit pays grand comme la moitié de la France, s’étend du Pacifique à l’Amazonie, en enjambant la cordillère des Andes. Plus d’altiplano à proprement parler, ici, mais un relief chaotique, hautement volcanique, fait de cônes aux sommets enneigés, de páramo (une sorte de pampa d’altitude) et de champs en damiers recouvrant jusqu’aux plus hautes pentes.
Malgré sa modeste taille, l’Équateur offre une étonnante palette de paysages et de cultures. Si les Indiens de la Sierra ont largement conservé leurs coutumes andines, les gens de la côte semblent plus proches des mœurs caribéennes. En Amazonie, les tribus luttent pour leur survie, menacée par l’industrie pétrolière et le déboisement. Quant aux citadins de l’Équateur, métis pour la plupart, il y a belle lurette qu’ils ont adopté le mode de vie occidental. Comme partout, ou presque, en Amérique du Sud, l’Église continue de jouer un grand rôle et les coups d’État militaires se sont succédés...
Si les vestiges archéologiques et l’architecture coloniale sont bien moins présents en Équateur qu’au Pérou, ce manque est en partie compensé par la beauté des paysages et la richesse de la nature – Amazonie et Galápagos en particulier. (...)
Les superbes villes coloniales de Quito (la capitale) et de Cuenca, témoignent de l'ère de la colonisation espagnole.Une immense forêt luxuriante qui couvre la mystérieuse Amazonie et semble s'étendre à l'infini. De nombreux et pittoresques petits villages amérindiens qui, perchés dans la cordillère des Andes, semblent s'être figés dans une autre époque, et où la culture et les traditions continuent de vivre grâce à ses chaleureux habitants et à ses marchés pittoresques comme, par exemple, celui d'Otavalo. Et, bien sûr, le magnifique monde insulaire des îles Galapagos, riches d'une faune et d'une flore unique."
LE GUIDE DU CROUTARD (Photo : Beautiful Cotopaxi © Francois Leens Juillet 2005)
Nous sortons de Madrid par les grandes avenues afin de rejoindre l'aéroport qui se trouve en plein milieu du désert. Quelques files d'attente plus tard, tout est prêt et Yan peut partir !
Nous l'avons alors regardé s'engouffrer dans les dédales des couloirs aéroportiens en chantant en choeur et à tue-tête "Je pars" de Nicolas Peyrac...
... puis il disparut derrière une porte automatique qui se referma dans un souffle.
Va petit bonhomme ! Cours dans la pampa équatoriale et envoies-nous des cartes postales d'oiseaux qui sifflent !
Un peu plus tard, mais pas beaucoup plus finalement, nous avons repris la route pour suivre la direction de Guadalajara, qui se prononce "Gouadalarara".
Non, il ne s'agit pas de la capitale de Jalisco au Mexique, que l'on surnomme également "la perle de l'Ouest" ; mais bel et bien la ville banlieusarde de Madrid.
Ici, pas de patrimoine colonial, ni de champs d'agaves tequilana servant à produire la téquila, mais si on est un petit peu passionné par les ronds-points, on y trouve quelques spécimens intéressants, comme...
Oui, oui, oui : encore Don Quichotte puisque nous traversons la région de la Mancha. A chaque fois que j'entends ce nom, "La Mancha", je pense automatiquement à Terry Guilliam... ah merde, je l'ai déjà écrit dans l'épisode précédent.
Bon, sinon, on peut parler du projet d'Orson Welles qui n'a jamais vu le jour non plus...
"Film inachevé réalisé par Orson Welles, Don Quichotte tente de relater les aventures du Chevalier à la triste figure perdu entre la Terre et la Lune, confrontant monde ancien face à la modernité dans une Espagne rêvée et reconstituée qui le conduit de la Manche à Pampelune en passant par l’Estrémadure… accompagné de son fidèle serviteur.
Film mythique d’Orson Welles, il a été tourné par morceaux sur une très longue période et inachevé. Pour des raisons économiques et de liberté créatrice, le film est muet, en noir et Blanc, sans script, sans scénario avec une caméra portable a été tourné de Paris, au Mexique, en Italie ou en Espagne au gré de l’inspiration.
Welles débute le tournage en 1955 à Paris puis le reprend en 1957 avant de l’interrompre à nouveau en 1959 pour le reprendre en 1961. En 1964 le film est « terminé » une première fois. Welles garde le film par devers lui, il en est le producteur et ne semble pas en être satisfait. Il continue à tourner des séquences, toujours en muet. C'est Francisco Reiguera qui joue le rôle de Don Quichotte. Acteur espagnol républicain interdit d’entrée en Espagn, il a 80 ans pendant le tournage et promène la silhouette de Don Quichotte du Mexique en Italie. Welles prolonge ainsi l’iconographie romantique définie par Honoré Daumier et Gustave Doré tout en lui attribuant de nouvelles aventures.
Welles remontera une deuxième fois le film dans les années 1970, puis semble à nouveau abandonner le projet, insatisfait, cherchant de nouvelles solutions. Don Quichotte est un « Work in Progress », un travail en cours, un rêve éveillé sur Don Quichotte et l'Espagne… Au total il existe plus de 10 heures de rush conservés entre Paris (Cinémathèque), l’Italie, le Mexique ou l’Espagne (Filmoteca). La Filmoteca Española conserverait ainsi 40 minutes de film monté et doublé par Orson Welles." (D'après WIKIPEDIA)
Certes, l'errance de Don Quichotte se passe dans cette région, mais plus proche de nous, nous pouvons également parler de "Voyage en Alcarria" de Camillo José Cela, prix nobel de litterature, dont le récit débute ici à Guadalajara.
Agé de trente ans, Camilo José Cela voyagea dans l'Alcarria (provinces de Guadalajara et Cuenca), sac au dos, du 9 au 15 juin 1946, notant au passage ce qu'il observait dans un pays modelé par le labeur de ses habitants, que l'on ne peut comprendre qu'au fil de rencontres simples, éphémères et vraies.
Comme l'écrit Xavier Denecker, "Allumer une cigarette, faire la sieste sous un arbre en regardant le vol d'une cigogne, partager une gourde de vin ou un vermouth à la table d'une auberge, accepter l'invitation d'un muletier et faire un bout de chemin à ses côtés sur la carriole, le voyage est fait de petits riens qui donnent au temps qui fuit la densité de l'éternité."
Nous traversons la Mancha par une autre route que celles empruntées par Camillo José Cela.
D'Ouest en Est, reliant Madrid à Saragosse, la route A2 s'est posée sur un plateau situé à 631 mètres d'altitude et qui nous permet de dominer de vastes paysages. A perte de vue, des étendues naturels s'offrent à notre regard, soumises aux variances de lumière guidées par de gros cumulus cotonnés. Quelques montagnes creusées par le vent dévoilent de fantastiques couleurs ocre orangée. Les villes et villages défilent : Valdenoches, Torija, Siguenza, Medinaceli... Personne dans les rues.
Nous quittons l'A2 à hauteur de Ricla. Pause dans un resto routier, typique des bords de routes lointaines...
Plusieurs personnes sont là, attablées ou au comptoir. De tous milieux sociaux, en famille, entre collègues, enfants, parents, grands-parents, jeunes et moins jeunes. Pause professionnelle ou retrouvailles. Ce couple à cette table à côté de la fenêtre donnant sur une petite terrasse où viennent fumer clients et personnel. Divers propos émis par tous ces gens raisonnent sur les murs de briques. Des rires, des phrases. Mais je ne comprends pas l'espagnol. Si tu veux, je peux me risquer à traduire ce que j'entends mot pour mot, mais cela risquerait de friser le ridicule, comme cela arrive parfois sur certains emballages ou certaines enseignes...
Lien : Best of des traductions de merde
Menu à 10 euros, vin tonic espagnol, un café et nous repartons sur la route A121.
Nous sommes à présent dans l'Aragon qui se distingue, entre autres, par ces grandes lignes droites, rythmées par les mouvements lents et reposants de nombreuses pales d'éoliennes...
Une autre version de Don Quichotte où ces engins récepteurs d'énergie ont remplacé les moulins à vent. L'énergie cinétique transformée en énergie mécanique sert désormais à fabriquer de l'électricité et non à moudre les céréales ou écraser les olives. C'est con ce que je dis, mais pourquoi pas.
Grands alignements d'éoliennes dans paysage vaste, une route toute en ligne droite, parfaite pour écouter un peu de Calexico et autres...
Alors, bon, tu m'fais marrer toi aussi. Rouler et méditer au milieu de ces vastes espaces qui semblent peu à peu nous absorber, c'est bien joli ; mais n'est-il pas possible de faire une pause quelque part ?
Eh bien, justement, cela tombe bien que tu en parles parce que nous avons le village de Magallon en approche...
...et comme tu le sais sûrement, Magallon se trouve à seulement quelques kilomètres de Borja, que nous atteignons maintenant.
Et hop, tiens, j'ai envie de finir ce billet sur cette belle photo.
DANS NOTRE PROCHAIN EPISODE
Maître Arnaud et Jénorme répondront-ils enfin à la question : "Mais à quel saint se vouer ?"