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LE VOYAGE DE JéNORME
LE VOYAGE DE JéNORME
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23 janvier 2019

Un petit tour dans le Morvan, épisode 4 (58)

Alors, après l'ancien village-centre de la zone Euro et le recueillement sur les lieux du Maquis Bernard. Après le tour du Lac des Settons à pied. Après la non-visite d'un sabotier mais la rencontre avec des vaches Highlands sans négliger cette petite dérive le long des côte du lac de Saint-Agnan aux airs d'Irlande, Jénorme s'en va prendre la direction du Morvan du sud, puis de l'ouest. Qu'allait-il découvrir ? Qui allait-il rencontrer ? Quelles histoires allait-il entendre ?
Quand soudain, ne voilà-t-il pas...

 

Je quitte à présent les rives du lac de Saint-Agnan pour prendre la direction, dans un premier temps, de Saint-Léger-Vauban, via la route du Hameau du Bon Rupt. Étrange nom, non ? Pas de chiffre, un nom bizarre : le Rupt. C'est comme ça. De plus, nous quittons la Nièvre pour l'Yonne.
Quelques kilomètres plus tard, je quitte la route du hameau du Bon Rupt à hauteur du hameau du Ruères où se trouve le manoir de Ruères du XVIème siècle ; lieu de naissance de Sébastien Le Peste de Vauban, le 1er mai 1633. D'ailleurs, en empruntant maintenant la Route de Saint-Léger (elle aussi sans numéro), c'est tout naturellement que j'arrive à.... à... Saint-Léger, oui, mais pas que puisqu'il s'agit de...

SAINT-LÉGER-VAUBAN
Saint-Léger-Vauban, statue (89)

Jusqu'au XIXème siècle, la commune s'appelait Saint-Léger-de-Foucheret. En hommage à Sébastien Le Prestre de Vauban, Napoléon III renomma la commune Saint-Léger-Vauban par un décret de 1867. 

Saint-Léger-Vauban, maison Vauban (89)Outre cette statue monumentale réalisée par Anatole Guillot, on peut également visiter la Maison Vauban, musée dédié à Sébastien Le Pestre, plus connu sous le nom la dénomination de Maréchal Vauban depuis sa nomination par Louis XIV. Le musée comporte une boutique et quatre salles, dont une salle de projection qui présente un DVD sur la vie et l'œuvre de Vauban. Ce n'est pas le bâtiment de sa naissance puisqu'il vit le jour dans le manoir de Ruères, qui ne se visite pas.
"Mais qui était Vauban ?", me demandes-tu alors.
Eh bien pour faire court, c'était un ingénieur militaire. Courageux, il allait jusqu'à espionner derrière les lignes ennemies. Il a participé à quatorze sièges durant lesquels il fut blessé plusieurs fois. Voyant mourir ses compagnons, il conçoit alors l'idée qui marquera son œuvre : multiplier les travaux pour économiser les vies. C'est ainsi que l'on doit à Sébastien Le Pestre de Vauban une multitude d'ouvrage militaire, tels que les citadelles de Lille et de Besançon, la forteresse de Montdauphin, les sites de Briançon et Château-Queyras, l'aqueduc de Maintenon, le canal du Midi, etc.
Vauban est resté toute sa vie attaché au Morvan et à sa terre natale. En1675, il a acheté le château de Bazoches, non loin de Saint-Léger, pour en faire sa demeure familiale et y installer ses ingénieurs militaires. Il meurt le 30 mars 1707 à Paris, à l’âge de 74 ans. Son corps est enterré dans l’église paroissiale de Bazoches. En 1808, son cœur est transporté dans l’église des Invalides à Paris. Ce transport ne fut d'ailleurs pas de tout repos, comme nous en avions parlé dans un précédent billet lors de notre passage à Bazoches (TNM, étape 2).

À Saint-Léger-Vauban, on peut également se recueillir devant la maison de René Rimbert, résistant mort en déportation en 1945 lors de la marche forcée vers Dora.

Je quitte Saint-Léger-de-Vauban par la D55 en direction de ma prochaine étape ; une ville au nom pas banal.

Bienvenue à
Quarré-les-Tombes, panneau (89)

Oula, prenons une photo un peu plus joyeuse pour célébrer notre venue dans la commune.

Bienvenue à
QUARRE-LES-TOMBES
Quarré-les-Tombes, église, sarcophages

Voilà, c'est mieux.
Bon, une fois de plus, nous pouvons nous interroger sur l'origine du nom de cette petite ville de quelques 600 habitants.
Alors, commençons par "Quarré". Je n'ai pas trouvé d'explication, mais, peut être, peut-on rapprocher le mot "Quarré" du mot "carrefour" puisque Quarré-les-Tombes est un peu le carrefour du Morvan. Quand nous arrivons au centre-ville, quatre destinations par quatre routes différentes s'offrent à nous, comme le montre la carte ci-jointe..
Ouais, ouais, on peut dire ça : Quarré, carrefour, très bien. après on peut se demander pour quoi "Quarré" et pas "Carré", mais n'allons pas trop vite.

Ensuite, on comprend que Quarré-Les-Tombe ne se nomme pas Quarré-Vauban puisque le maréchal ne peut pas être né partout. Mais pourquoi "les-Tombes" ?
Si je ne parviens pas à trouver l'origine de la première partie du nom, il faut savoir que "Les-Tombes" provient du grand nombre de sarcophages en pierre, placées dans le cimetière entourant l'église.
D'accord, mais alors pourquoi Quarré-les-Tombes ne s'appelle pas "Quarré-les-Sarcophages" ?
Bon, eh oh, hein ! Regardons plutôt ces quelques photos de cette étrange présence avant de rentrer d'avantage dans les détails et le sraisons de la présence inquiétante de prime abord de ces objets d'une autre époque.

Quarré-les-Tombes, église, sarcophages (89)          Quarré-les-Tombes, église, sarcophagesQuarré-les-Tombes, église, sarcophages          Quarré-les-Tombes, église, sarcophages

Autrefois, ces sarcophages (que nous appellerons également cercueils, tombes afin d'éviter les répétitions) étaient au nombre de deux mille. Ils ont été mis au jour à l'occasion de la création d'un cimetière extra-muros et proviendraient de la carrière de Champ-Rotard près de Dissangis.
Aujourd'hui, il ne reste plus que 112 morceaux de ces tombes de calcaire : 46 cuves et 66 couvercles, datés du VIIème siècle et de la première moitié du VIIIème siècle.
La première question que l'on peut se poser sur cette présence funèbre est "sont-ils plein ?" ; autrement dit y'a t-il des corps momifiés à l'intérieur et qui se réveillent chaque nuit de pleine lune pour venir hanter les rues de Quarré-les-Tombes à la recherche de qui un jambon du Morvan, de qui de la rapée morvandelle ; le tout aux sons de quelques vielles poussées par quelques anciens galvachers de l'au-delà.
Eh bien non. Rassure-toi, ô touriste inquiet, tous ces tombeaux de granit sont vides. Consternes-toi alors, ô toi le gothique qui avait déjà préparé ta valise pour venir passer le reste de tes jours dans cette charmante bourgade morvandelle.
Mais tout ceci ne nous explique toujours pas comment ont été réalisées ces tombes ? Comment sont-elle arrivées ici et pourquoi ?
Pour répondre à ces multiples interrogations, lisons l'article de L'Yonne Républicaine :
"L’interrogation, qui perdure encore aujourd’hui, a fait naître plusieurs hypothèses.
Les religieux soutenaient notamment que les Quarréens pouvaient être des marchands de tombes, le village se situant à un carrefour de la voie romaine qui reliait Auxerre à Autun. Un endroit stratégique donc, pour le commerce de tombeaux. Mais Quarré pourrait également constituer une nécropole, entourant le sanctuaire de saint Georges.
Le village de Quarré est ainsi devenu Quarré-les-Tombes après la Révolution française, alors qu’on a pris conscience de l’identité des lieux, qu’il était important de souligner d’avantage." Cléo Parret pour L'YONNE REPUBLICAINE

Mais plusieurs mystères demeurent. Mystères qu'a relevé Sébastien Desurmont pour le magazine Géo :
"(...)Les 112 éléments restants sont en calcaire, or le Morvan est le pays du granite. On sait que la matière première des sépultures de Quarré-les-Tombes, elle, provenait de carrières situées près de Coutarnoux, trente kilomètres plus au nord. Alors que chaque tombe pesait 800 kilos, pourquoi des marchands des VIIe et VIIIe siècles auraient-ils choisi de faire un tel voyage pour établir leur supermarché du monument funéraire ? Les plus beaux tombeaux, ceux qui auraient pu par leurs bas-reliefs révéler quelques secrets, se sont volatilisés : vendus, volés, enfouis sous le bitume ou remployés dans les soutènements des maisons. Mais sans doute pas reconvertis en auges pour les animaux car une rumeur ancienne prétendait que des chevaux y burent un jour et périrent dans la minute. Une autre légende suppose que cette accumulation cache en réalité une nécropole mérovingienne jadis placée sous la protection de saint Georges. Aux premières heures de la chrétienté, celui qui terrassa le dragon était vu comme un excellent intercesseur sur la route du paradis. A la sortie du bourg, on peut observer ce qu’on nomme ici le champ Cullan, une prairie dont la pente raide sert l’hiver de piste de luge. S’y déroula vers le VIIIe siècle une bataille entre sarrasins et chrétiens. Le chef de ces derniers, Renaud, fils du roi des Ardennes, s’endormit durant le combat au pied d’un chêne, bercé par le chant d’un rossignol. La victoire fut toutefois obtenue de justesse, grâce à l’intervention de saint Georges. En contrebas du champ de bataille, le minuscule ruisseau devint un fleuve de sang, déborda et entacha la prairie à tout jamais. L’herbe y est en effet plus brune par endroits. Effrayé par la folie des hommes, le rossignol aurait, quant à lui, quitté les lieux pour toujours. Mais le dimanche, à l’heure où l’on déguste des gaufres, une mélopée triste s’échappe parfois des frondaisons. Il faut tendre l’oreille, y croire un peu. On entend alors siffloter un oiseau virtuose. Quelque chose qui ressemble à une oraison funèbre… Un requiem pour les défunts de Quarré-les-Tombes ?" GEO

Toutefois cependant pourtant encore et quand bien même, si nous revenons sur les premières lignes de ce que j'ai écrit sur Quarré-les-Tombes, tu retrouveras ces mots : "Autrefois, ces sarcophages étaient au nombre de deux mille.".  Mais alors, où sont passés les 1888 manquants ?
Est-ce que certains habitants les ont pris pour en faire des tables basses afin de surprendre leurs invités lors d'apéros dînatoires ? Est-ce que ces sarcophages ont été broyés par la municipalité afin de les transformer en pierres dans le but de construire un mur ? Est-ce que des gothiques seraient venus une nuit pour les voler afin d'en faire leurs lits ?
Mystère !

Outre cette présence originale, Quarré-les-Tombes possède bien d'autres atouts touristiques. Tout d'abord avec ces petits commerces de proximité, variés et aux noms originaux reprenant sous la forme de jeux de mots le nom de la commune.

Quarré-les-Tombes commerces (89)           Quarré-les-Tombes, commerces

Quarré-les-Tombes, commerces (89)

Coiffeur, épicier, boucheries, café, bar, restaurant, pharmacie, boulangerie, mercerie, commerce bio, quincaillerie, épicerie fine... Putain, mais c'est les Champs-Elysée, Quarré-les-Tombes ! Sans oublier, bien sûr, Quarré de chocolat, artisan chocolatier, pour qui bon nombre de personnes se déplacent pour venir en été goûter ses fameuses gaufres... Mais il fait du chocolat ?! Oui, mais il fait des gaufres aussi. Et il fait plein d'autres choses, comme des crèmes de caramel, des pâtes à tartiner,... Tout ceci artisanalement !
Tout près de Quarré-les-Tombes, les marcheurs aiment aussi venir ici pour se lancer sur les sentiers de la mystérieuse forêt au Duc et ses fontaines miraculeuses ou encore pour prendre la direction du Rocher de la Pérouse,point culminant du département (556 mètres d'altitude), de la Roche des Fées ou de La Pierre qui vire qui furent peut être, en d'autres temps, le théâtre de quelques célébrations nocturnes et sacrifices humains...

Allez, on s'en va !

Je retourne à la voiture garée devant cette belle maison rose.
Quarré-les-Tombes, maison rose (89)

Prochaine étape : le lac de Crescent. Je suis la D10, plein Nord, direction Avallon. Petite pensée pour Roxy Music.

HOP : on tourne à gauche, direction Saint-Germain-des-Champs par la D36. De bien belles routes morvandelles où alternent hameaux et champs, collines et forêts. Sauvages, tranquille. À Saint-Germain-des-Champs, on tourne encore à gauche, direction plein sud ! Ehla, mais je fais n'importe quoi, là. Pourquoi plein Nord et après plein sud ? On va dire que j'ai fait un léger détour, tout simplement parce que c'était beau. Tiens, d'ailleurs, si je n'avais pas fait ce détour, je n'aurais jamais croisé ce beau château...

 

CHÂTEAU DE
CHASTELLUX-SUR-CURE

Chastellux-sur-Cure, château

Il s'agit du château de Chastellux-sur-Cure. Domaine privé, mais qui se visite sur demande à la famille occupante car le château est toujours habité par la famille qui l'a construit, fait rarissime en France. Oui bon, eh attention : ce ne sont pas les gens qui étaient là pour l'édification du château puisque celui-ci date du XIème siècle ; du moins en ce qui concerne les parties les plus anciennes encore existantes, comme la tour Saint-Jean.
Certaines scènes du film "Mon oncle Benjamin" réalisé par Edouard Molinaro en 1969, notamment celle où Bernard Blier embrasse le postérieur de Jacques Brel ou encore celle-ci.

Je poursuis ma route, laissant le château derrière moi, petit à petit caché par la forêt pas si automnale que cela pour cette saison.

Chastellux-sur-Cure, château (89)

Non mais regarde-moi ces arbres ! Ils sont verts quoi ! Y'a plus de saison, tout fout l'camps !!! Et quelques minutes plus tard, j'arrive sur le parking du lac du Crescent.

 

LAC DU CRESCENT
Lac de Crescent, plage

Oui, je suis d'accord :
1) Cette photo ne reflète pas le côté 'écossais' de ce beau lac morvandiau.
2) Cette photo n'est pas très belle et pas très intéressante... encore que.
Elle nous montre qu'il n'y a pas beaucoup d'eau dans le lac.
Pourquoi ? Réchauffement climatique ? Manque de pluie à cette époque de l'année ? Écoulement volontaire de la réserve pour se préparer à des pluies prochaines ?
Nous sommes loin des belles étendues d'eau bleue cernées par la verdure du mois de juin 2007...

Lac du Crescent 1             Lac du Crescent

Bon... Parlons un peu de ce lac qui, en d'autres temps, en d'autres saisons, est un véritable havre de paix par ses couleurs, sa quiétude et son mélange terre-mer sauvage.
Tout d'abord, le lac du Crescent doit son nom à sa forme de "croissant" que l'on peut découvrir grâce à la couleur verte présente sur la carte ci-dessous.

Crescent-4Bon... Vu d'ici, ce n'est pas si évident. C'est un croissant qui est un peu loupé.
Quelques chiffres à présent, veux-tu.
Superficie : 165 hectares
Volume : 14,25 millions de m3
Profondeur moyenne : 28 mètres

A l'origine, il est créé en 1932 pour réguler les eaux de Seine, mais aussi pour produire de l'électricité.
D'ailleurs, je me trouve au niveau du barrage ; ce qui n'est pas le plus endroit à contempler.

Lac de Crescent, barrage (58)

Oui, comme ça, on dirait une grande piste de skate. Mais cela nous donne l'occasion, une fois de plus, de parler chiffres.
Construit de 1929 à 1932 au titre des dommages de guerre dus à l'Allemagne à la France après la Première Guerre Mondiale, le barrage, c'est :
- 330 mètres de long
- 37 mètres de haut
Il permet également d'approvisionner l'Avallonais en eau potable... Enfin, là, quand je vois le niveau de l'eau du lac, j'ai un peu peur que les Avallonais ne boivent que des cailloux.
Le réservoir de Crescent se nourrit des eaux de la Cure et du Challaux, deux rivières à truites réputées du Morvan. Le lac abrite également le sandre, la perche et la carpe. Depuis quelques temps, on remarque que les effroyables écrevisses californiennes sont de plus en plus abondantes.

Le lac du Crescent est très prisé pour ses activités nautiques (nage, bateau, canoë, paddle,...). Mais attention : les fonds sont encombrés et surtout très abrasifs ; les rochers coupent comme des lames de rasoir. De plus, il n'existe aucune plage surveillé. Le lac reste sauvage.
Il a également été courtisé par la télévision et le cinéma pour le tournage du téléfilm "Le fantôme du lac" en 2007 avec Mylène Demongeot et Linda Hardy et le film de Michel Gondry, "Microbe et Gasoil" en 2015.
J'aime bien l'histoire de "Microbe et Gasoil"...

SYNOPSIS : "Daniel, surnommé "Microbe", est un enfant timide et rêveur. Quand Théo, dit "Gasoil", plus ouvert et déluré, est parachuté dans sa classe en cours d'année, une forte amitié naît entre les deux adolescents.
À l'approche des grandes vacances, une idée folle germe dans la tête des deux amis : construire leur propre voiture avec quelques planches et une tondeuse à gazon, et partir sur les routes de France..." WIKIPEDIA

 

ALLEZ, C'EST REPARTI !

 

La fin de journée approche. Je prends la direction de la capitale... nivernaise. Nevers.
Les hameaux et petits villages défilent lorsque je prends la direction de l'ouest. Chalaux, Saint-Martin-du-Puy, Empury, Pouques-Lormes.
Tiens, Pouques-Lormes, encore un lieu de tournage de film où je m'étais rendu l'année dernière.

 

POUQUES-LORMES
Pouques-Lormes

T'as reconnu ? Non. Tout de suite, un indice !

POUQUES-LORMES
Pouques-Lormes 1

Eh oui, c'est ici, sur la D958, à hauteur du domaine du Drémont, entre Bazoche et Corbigny (à la louche), qu'a été tournée une scène mythique du cinéma français.

SOUVENONS-NOUS !

Voilà, ça, c'est dit ! Continuons.

 

Toujours sur la D958 qui relie Vezelay à (presque Sauvigny-les-Bois), je passe par Corbigny.

CORBIGNY
Corbigny, vue du mémorial (58)

Alors oui, d'accord, pas de problème : on ne voit pas très bien la ville vu d'ici. Mais il est difficile d'avoir un autre panorama de cette charmante et dynamique ville de la frontière morvandelle. Et puis, si j'ai pris la photo d'ici, c'est parce qu'un truc sur une colline environnante avait interpellé mon attention.

Et ce truc,
c'est ceci !
Corbigny, memorial de l'Emeraude (58)

Mais qu'est-ce que cela pouvait être donc ? Après le plus grand sabot du monde, peut être la plus longue barette du monde ? Ou le plus grand diapason d'Europe ? Mais si c'était le cas, pourquoi ici à Corbigny ? Est-ce la ville où est né celui qui inventa cet outil produisant un son dont la hauteur est fixe dans le but d'obtenir une note de référence, typiquement un la ?
Ooooooh que non ! Pas du tout, rien à voir ! Mais avant de connaître la réponse, parlons un peu de Corbigny elle-même.

Corbigny est une commune française d'environ 1600 âmes. Située aux portes du Morvan et à la limite du Nivernais, elle se trouve dans une région de collines aux formes arrondies. Autrefois, Corbigny était l'une des premières étapes pour les pèlerins partis de Vézelay à destination de Saint-Jacques-de-Compostelle. Ils honoraient dans ce bourg les reliques locales, fort controversées, de saint Léonard. La commune est également réputée pour être au cœur d'une région d'élevage de bovins (Charolais).
En traversant la rue principale, je suis frappé par le nombre de magasins pour une si petite ville. En fait, le commerce s'y maintient dynamiquement du fait de la présence nombreuse de résidents secondaires durant la période estivale. Une foire commerciale se tient également ici tous les deuxièmes mardi du mois, attirant un public nombreux venu des environs.

Mais revenons à nos moutons, et plus précisément à ce truc là qui est posé sur une colline dominant la ville !

Il s'agit d'un monument, d'une sculpture rendant hommage aux victimes de l'accident du Dewoitine D.332 Émeraude. D'accord, mais qu'est-ce que le Dewoitine D.332 Émeraude ?

Trimoteur de transport 8 passagers, cet avion est construit en un seul exemplaire par Émile Dewoitine en 1933. Il réalisa son premier vol le 11 juillet 1933. Sous le numéro 3528, son premier vol commercial est enregistré le 9 septembre 1933.

Corbigny, memorial de l'Emeraude"Le D 332 est né d'une spécification de la compagnie Air Orient de 1932, demandant un trimoteur long courrier pour assurer ses lignes d’extrême orient. Le cahier des charges exigeait de pouvoir transporter 8 passagers et leurs bagages, ainsi que 400 kg de fret, sur 2000 km (sans vent), et à une vitesse de croisière de 220 km/h. De plus, l'appareil devait pouvoir maintenir une altitude 2500m, en cas de panne d'un quelconque moteur. Dernier impératif, aucune dimension de l'avion ne pouvait dépasser 29 m, du fait de la taille des hangars. (...)
Dès le 7 septembre le D 332 s'attribua quatre records du monde : sur 1000 km avec 1000 kg de charge, à la vitesse moyenne de 259,56 km/h (ancien record à 224,78 km/h), et sur 2000 km avec des charges de 500, 1000, et 2000 kg, avec une vitesse de 255,25 km/h (anciens records à 228,27, et 151,36 km/h). Puis il effectua un voyage officiel en Union Soviétique entre les 12 et 22 septembre 1933, parcourant 13 000 km sans aucun problème.
Il fut officiellement remis à Air France, qui avait pris la suite de Air Orient, le 3 novembre 1933. La compagnie lui fit effectuer ses essais d'endurance avant mise en service opérationnel, avec une liaison Paris-Lyon-Marseille, puis un Paris-Dakar, suivi d'un Paris-Alger.
Puis, du 21 au 28 novembre le Dewoitine D 332 effectua la première liaison sur l’extrême orient, sa raison d'être. 48 h30 de vol suffirent pour relier Marseille à Saigon. Lors du vol retours, le 15 janvier 1934, sur le dernier tronçon, entre Lyon et Le Bourget, il fut pris dans un tempête de neige, et s'écrasa sur le Morvan, tuant ses 10 passagers et membres d'équipage, donc Maurice Nogues, directeur général adjoint d'Air France, Maurice Baluzac, le directeur technique, Emmanuel Chaumier, directeur de l'Aviation Civile, et Pierre Pasquier, Gouverneur Général de l'Indochine." AVIATIONSMILITAIRES

Une carrière de six mois qui aurait pu être encore plus dramatique si l'avion s'était écrasé sur Corbigny.
En 1938, un monument commémorant l'accident fut érigé non loin du lieu de l'accident. Il est constitué de quatre colonnes pointées vers le ciel adossé à une stèle inclinée. Sur celle-ci sont placés dix médaillons rappelant les noms de chacune des dix victimes. La stèle, large de 26 mètres, représente l'envergure de l'appareil. Le long du chemin montant jusqu'au monument, plusieurs panneaux rappellent l'histoire de la ligne extrême Orient, de la construction de l'appareil et de ses entreprises jusqu'à l'accident.

Corbigny, memorial de l'Emeraude, panneau (58)

Corbigny, memorial de l'Emeraude, panneau          Corbigny, memorial de l'Emeraude, panneau

 

Je retourne à la voiture garée un peu plus bas.
C'est après avoir effectué quelques 3,2 kilomètres plein Ouest que j'arrive à Chitry-les-Mines, village de quelques 200 habitants, dont le maire, de 1904 à 1910, ne fut autre que Jules Renard.

 

CHITRY-LES-MINES
Chitry-les-Mines, place Jules Renard (58)

Comme tu peux le voir, j'ai pris cette photo à une autre époque, en une autre saison ; une saison où les arbres avaient des feuilles bien vertes. Mais là n'est pas le sujet.
Écrivain, journaliste, membre de l'Académie Goncourt, Jules Renard est né à Chalons-du-Maine le 22 février 1864. Il a écrit, entre autres, Poil de Carotte. Dans ce livre, il parle d’une maison où vit le jeune Poil de Carotte. Cette maison, située au début de la voie gallo-romaine dite "vieille route", existe toujours après avoir été modifiée par Jules Renard peu avant sa mort en 1910.

Chitry-les-Mines, maison Jules Renard (58)                 Chitry-les-Mines, maison Jules Renard

Jules Renard vécut toute son enfance ici à Chitry-les-Mines. On lui doit quelques citations, telles que "Si au lieu de gagner beaucoup d'argent pour vivre, nous tachions de vivre avec peu d'argent ?", "Penser ne suffit pas : il faut penser à quelque chose.", "L'homme vraiment libre est celui qui sait refuser une invitation à dîner sans donner d'explications."

Il est aujourd'hui enterré dans le cimetière du village, non loin de l'acteur Paul Frankeur que l'on a pu voir dans des films comme "Les enfants du Paradis" de Marcel Carné, "Jour de fête" de Jacques Tati, "Touchez pas au grisbi" de Jacques Becker, "Razzia sur la schnouf" d'Henri Decoin, "Le deuxième souffle" de Jean-Pierre Melville, "La voie lactée", "Le charme discret de la bourgeoisie" et "Le fantome de la liberté" de Luis Bunuel, ainsi que dans "Un singe en hiver" d'Henri Verneuil où il joue le rôle de Lucien Esnault, le patron du café.

 

Voilà.
Ce beau et instructif périple morvandiau se termine.
Je glisse lentement sur l'asphalte de la route D977bis en direction de Nevers. Chitry, Guipy, Saint-Reverien, Moussy, Prémery...
Le soleil disparaît là-bas, à l'horizon...

Bona, sur la route (58)

 

 

Commentaires
J
Merci Shana ou Angelilie.<br /> <br /> Bonne journée.
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