UN P'TIT TOUR à NAVARRENX (64)

Lors d'un précédent billet, Jénorme avait décidé de suivre une route : la D936 (Route D936, part One). Celle-ci l'avait promené de Saint-Pierre d'Irube dans le Pays Basque à Oloron-Sainte-Marie dans le Béarn. De villes en villages, il avait alors décidé de marquer un arrêt un plus long à Navarrenx afin de découvrir la cité bastionnée. C'est cette promenade que nous allons découvrir à présent.
Quand soudain, ne voilà-t-il pas...

Eh oui, l'automne, c'est beau. Ces forêts colorées rouge-orangées, ces parfums de feuilles mortes, cette fraicheur qui te fait couler le nez.
mais l'automne, c'est aussi la chasse et je ne suis pas très rassuré quant à aller me promener dans les bois.

Donc je reste en ville.
La RD936 me fait passer au pied d'un panneau très complet, vantant quelques mérites de la ville de Navarrenx.

Le panneau touristique située avant l'entrée en ville annonce la couleur : "Navarrenx, cité bastionnée, capitale mondiale de la pêche au saumon". Et cela est illustré par les deux ronds-points suivants ce panneau.

Allons y faire un tour.
NAVARRENX, J'ARRIIIVVEEE !!!!

Il est vrai que quand on quitte la D936 pour emprunter la D115 et rejoindre la ville, on ne voit que cela : les remparts. Bon, sur la photo ci-dessus, on voit surtout le bac à fleurs, mais sinon ce sont plutôt les remparts qui dominent, comme si la ville avait été aspirée. Enveloppée, disons plutôt.
Rapprochons-nous.

             

Et si tu as la passion "remparts", saches que tu peux également aller en dessous avec les galeries souterraines.

Eh oui, l'incroyable tunnel des Contremines. Long de 140 mètres, il s'en va se perdre sous les remparts. Obscurité et silence. Un dispositif ingénieux qui permettait d'écouter et surveiller si un ennemi tentait de s'approcher pour miner les remparts.

Bon, eh oh. Attention, tu peux aussi te promener dedans, au même niveau...

       

      

Alors non : ce n'est pas dans cet escalier qu'ont été tournées quelques scènes du film de Todd Phillips, "Joker" avec Joaquin Phoenix.

Et du dessus, quand tu te promènes sur la ronde... Qu'est-ce que tu vois ?

       

Quoi ? Qu'est-ce qu'y y'a ? Trop de remparts encore ?!
Bon, eh oh, calmons-nous et penchons-nous (pas trop) sur l'histoire de cette ville béarnaise pas banale. Et pour cela, allons lire quelques lignes des fiches des Editions Atlas qui m'ont fait aimer et découvrir ce pays de façon originale avant qu'Internet n'existe. Du coup, les écrits datent peut être un peu, mais sont tout de même réconfortants.

Tout d'abord, la naissance de Navarrenx, ou plutôt la construction de ses remparts. Navarrenx existait déjà bien avant.
On trouve des traces de son existence dès le 1er siècle après Jésus-Christ. Son nom vient du latin "Sponda Navarrensi", signifiant "la bordure de la Navarre".

"Vicomte du Béarn, puis petite bastide agricole, Navarrenx doit ses remparts séculaires aux rois de Navarre qui établirent cette forteresse pour défendre leur royaume.
En 1537, les murs sont achevés selon le modèle italien importé par un architecte de Vérone, Fabricio Siciliano, et le protestant Béarn se trouve en position de résister aux convoitises catholiques."

1,66 km de remparts hauts de 10 mètres, aux murs calfeutrés de terre et percés de portes fortifiées, quatre bastions, des galeries souterraines de contre-mines, un magasin à poudre et une fontaine militaire.

"Les guerres de Religion qui ensanglantèrent le Béarn ne parvinrent pas à ébranler Navarrenx, et le nouveau système fortifié. Ainsi, en 1569, Charles IX, profitant de l'absence de Jeanne d'Albret (reine de Navarre et mère d'Henri IV), assiégea la cité où s'étaient réfugiés nombre de protestants : la place résista.
Ironie de l'histoire, c'est Louis XIII, petit fils de Jeanne d'Albret, qui prit Navarrenx en 1620, restaura le catholicisme et ramena le Béarn à l'autorité."

La maison de Jeanne d'Albret est aujourd'hui mentionnée par une petite plaque et un explicatif historique.

       

Complètement restauré, le périmètre fortifié se visite à pied.

        

Ouais Ok, mais maintenant, parlons d'autre chose que des remparts.

"Au fil de votre flânerie, vous verrez deux portes : la porte Saint-Antoine, vers l'Espagne, avec sa belle échauguette, et la porte Saint-Germain, vers la France (on dit que ses meurtrières renvoient sept fois les sons).
Bastionnée des six côtés, la ville possédait un pont-levis, dont les chaines existent toujours."

Via la carte IGN satellite, je regardais Navarrenx vue du ciel, et je trouvais que la cité bastionnée avait l'apparence d'un poisson...

Photo : Géoportail

Mais si,
enfin, allons !

Et c'est là, alors peut être, que nous pouvons mieux comprendre pourquoi Navarrenx est devenue la capitale mondiale de la pêche au saumon. Ou pas. A-t-on construit ces remparts en forme de poisson avant que les saumons ne reviennent ici parce qu'ils y étaient nés, ou l'inverse ? Hein ? Je ne comprends rien à ce que je viens d'écrire.
On peut également regarder le ciel depuis Navarrenx et voir ceci...

Et là, on distingue très bien le visage de l'acteur Robert Mitchum. Enfin, surtout les yeux et la bouche.

Ouais, bon, là, on ne le reconnait pas très bien parce qu'il n'est pas dans une cabine téléphonique, mais ça ressemble.

Allez, dépassons les remparts et voyons ce que nous propose la cité.

Austère de prime abord, diront certains. Tant pis pour eux.
Et c'est là, comme nous le disions tout à l'heure avec Viellenave-de-Navarrenx, qu'il faut quitter la périphérie des villes pour entrer dans le centre. Percer les remparts et s'aventurer dans le coeur de la cité bastionnée.
Et quand nous entrons dans la ville, de suite, ce sont des rencontres.

              

Eh oui, une fois passé les remparts, et notamment la fameuse balade de la promenade de la porte d'Espagne, un nouveau monde apparait. Un monde peuplé de belles façades de maisons, de blasons, de jardins secrets et d'une sculpture en osier.

          

Mais aussi des commerces variés et accueillants. Des bars, des restaurants, des boucheries-charcuteries réputées et reconnues, une quincaillerie et autres encore.

L'activité s'est un peu réduite.
Autrefois, jusqu'au XIXème siècle, le port fluvial de Navarrenx voyait passer les 300 radeaux composés de fûts de sapins provenant de la vallée d'Aspe. Au printemps, les radeleurs les conduisaient jusqu'à Bayonne, où la Marine royale en faisait des mâts pour ses navires.
Plus proche, une très importante fabrique de meubles (Lansalot) a disparu, ainsi qu'une fabrique de cigares qui produisait et commercialisait des cigares fabriqués par des ouvrières cubaines à partir de tabac cultivé localement, vendus sous la marque Navarre puis Hedon.

Mais Navarrenx a d'autres atouts avec une activité reposant sur l'agriculture, l'artisanat et le tourisme.
Elle est une des grandes cités d'accueil de pèlerins sur les chemins de Compostelle par la voie du Puy, voie la plus fréquentée.

              

Navarrenx sait t'accueillir en son sein si tu dépasses les primes apparences.
"La petite ville de Navarrenx est une des plus anciennes cités de la Province. Au confluent de deux rivières, le Lorroder et le Gave d'Oloron, Navarrenx offre un calme rafraichissant au visiteur qui veut bien s'y arrêter..."

En même temps, est-ce que la population navarraise a envie de voir des troupeaux de touristes arriver en ses terres et subir le même sort que ce qui se passe sur les côtes basques en ce moment ?

Il y a tellement de départements et de campagne sen France, pourquoi aller tous au même endroit ? Hein ? Hein ? C'est bien la Creuse, c'est super la Nièvre !

Continuons.

"L'autre curiosité de Navarrenx n'est autre que l'église Saint-Germain d'Auxerre qui se trouve place de la Mairie."

Ah. Oui, il aurait été plus logique peut être qu'elle se trouve place de l'église. Mais la mairie alors, se trouve-t-elle place de l'église ? Et pourquoi Auxerre alors que nous sommes à Navarrenx ?
Pardon. Reprenons.

Edifiée à partir du début de l'année 1551, l'église aurait été achevée en 1560.
Le pas de la porte d'entrée est très beau.

J'ai été accueilli par un petit oiseau qui faisait la quête, non loin du panneau qui souhaitait la bienvenue aux pèlerins de Saint-Jacques-de-Compostelle.

            

Comme nous l'avons vu plus haut, L'église fut transformée en temple protestant quelques années après son édification sur ordre de la reine Jeanne d'Albret. Une partie servant de temple, l'autre de magasin à poudre.
Le culte catholique y fut rétabli en l'église Saint-Germain-d'Auxerre à la suite de l'arrivée du roi de France Louis XIII, souhaitant la fin définitive des guerres de religion en 1620.

Entrons.

L'église se compose d'une nef à quatre travées, terminée par un chœur à cinq pans. L'ensemble est recouvert de voûtes à liernes et tiercerons qui ont reçu une décoration originale.
L'intérieur de l'église est très coloré.

        

Ses arcs sont décorés de têtes humaines sculptées et peintes.

        

Autre chose à savoir :
ici...

Après cette petit visite, je retourne dans les rues de Navarrenx.
Juste à côté de l'église, un petit jardin...
     

A quelques mètres au nord de l'église se trouve la Fontaine Militaire, un lieu particulier, comme creusé dans le sol.

Un panneau touristique nous explique l'origine et l'histoire de cette fontaine.
"Sans doute aménagée avant la construction des remparts (en 1569), cette fontaine est située à 4,60 mètres au dessous du niveau du sol. On y accède par 21 marches d'un escalier de belles pierres. Son débit de 1700 litres/heure en été suffisait largement aux besoins des habitants de la place, civils et militaires. Sa source, dont l'emplacement reste incertain, n'a jamais été détournée ni empoisonnée par l'ennemi lors des sièges et blocus de la cité."

Je descends à hauteur des trois griffons qui distribuent l'eau. Juste derrière eux, dans une pièce de 4.7 mètres sur 4.6 mètres surmontée d’une très belle voûte de pierre, on découvre les chambres à eau.

         

Je ne m'y suis pas rendu, captivé que j'étais par cet énorme visage sculpté dominant la fontaine.

"En 1952, sous prétexte d’une ancienne épidémie de typhoïde prétendument provoquée par l’eau de la fontaine, le maire fit combler subrepticement la fontaine, démolir le mur de protection et bitumer l’emplacement, de 75 m² environ, pour en faire une place publique. Les 16,17 et 18 Juillet 1989, la municipalité fit ouvrir et restaurer ce monument de l’histoire de Navarrenx, objet aujourd’hui d’un mouvement de curiosité." FONTAINES DE FRANCE

 
Allez, je sors à présent de la fontaine, puis de la cité en passant devant la poudrière restaurée...

...puis en empruntant le passage Liszt, du nom du célèbre musicien hongrois (1811-1886).

      

Le célèbre compositeur et virtuose pianiste hongrois est donc passé par Navarrenx ?
"Sous la porte fortifiée, une plaque rappelle le passage, en 1828, d'amoureux illustres : le pianiste Franz Liszt et son élève paloise, Caroline de Saint-Cricq, qu'il dut quitter car le comte de Saint-Cricq, financier du royaume, avait pour sa fille d'autres ambitions. Il est cependant beaucoup plus probable que ce passage ait eu lieu en 1844. En effet, on connaît l'emploi du temps de Franz Liszt de janvier à juillet 1828, date de la rupture avec Caroline de Saint-Criq. Cet emploi du temps ne mentionne aucun voyage. On voit mal comment un jeune homme de 16 ans, sans moyen, et une jeune fille de 17 ans sévèrement surveillée auraient pu quitter Paris pour venir se promener à Navarrenx. À cette époque, un tel périple durait 15 à 20 jours minimum aller-retour. On sait par contre que Liszt a séjourné du 7 au 21 octobre 1844 à Pau, et qu'il a rencontré à cette occasion Caroline de Saint-Criq, épouse D'Artigaux. C'est donc très certainement dans ces jours-là que se situe la fameuse visite sur les remparts de Navarrenx." WIKIPEDIA
 

Je quitte les remparts pour retrouver une route passagère. Je traverse la Gave d'Oloron par le pont pour arriver au quartier Mousseroles.

Bon... Certes, il n'y a pas de remparts, mais il n'y a pas beaucoup de vie non plus.
"Appelé autrefois le quartier du bout du pont de Navarrenx, il lui a été annexé au XIXème siècle avec l'accord des communes de Castenau-Camblong et Susmiou qui le possédaient.
Son nouveau nom vient du quartier de Bayonne où accostaient les radeaux qui partaient du chemin de la Matûre, un hôpital existait pour accueillir malades et pèlerins."

Je quitte le quartier Mousseroles pour retraverser le pont, puis descendre sur les bords du gave.
Un sentier est proposé pour découvrir ces lieux reculés.
     

Mais je n'aurais pas le temps.
Pour le moment, je me contente de descendre sous le pont de Navarrenx pour "admirer" le reflet d'une de ses arches dans les eaux du gave.

       

Autrefois, le pont de Navarrenx avait une tour de défense, comme on peut encore en voir aux ponts d'Orthez ou à celui de Sauveterre-de-Béarn, un octroi y était perçu.
On rejoint ainsi l'île Charron.

L'île Charron ne ressemble pas du tout à l'île de la Glère de Sauveterre-en-Béarn.
On ne sait pas trop où elle commence, ni où elle se termine. Un vague sentier tente de longer les bords du Gave.

       

L'île est en fait posée entre le Gave et un bras du gave  -ce jour là un peu à sec. Juste en face de ce bras et de la passerelle qui le surplombe, les "restes" de l'ancienne micro-centrale électrique dominent.

Comme nous l'avons déjà dit plus haut :
Autrefois, jusqu'au XIXème siècle, c'est par ici, sur le Gave, au port fluvial de Navarrenx, que passaient les 300 radeaux composés de fûts de sapins provenant de la vallée d'Aspe. Au printemps, les radeleurs les conduisaient jusqu'à Bayonne, où la Marine royale en faisait des mâts pour ses navires.

Et comme nous l'avons déjà dit aussi un peu plus haut : ici, à Navarrenx, le saumon occupe tous les esprits entre mars et juillet.
Chaque année de puis 1954, le championnat du monde de pêche au saumon dans le gave d'Oloron attire un public international. Les pêcheurs se pressent dans les boutiques spécialisées de la rue Saint-Germain et guettent la prise de plus de 10 kilos qui leur vaudrait le premier prix. Le Pool Masseys ne désemplit pas. Les poissons s'y reposent au calme avant de franchir l'échelle à saumons et de poursuivre leur chemin. Cette digue se trouve en aval du gave.

Mais je n'irai pas jusqu'au Pool. Je remonte sur la route pour retrouver ma voiture et m'en aller reprendre la RD936.

Allez,
une petite vidéo de cette errance navarraise.