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LE VOYAGE DE JéNORME
LE VOYAGE DE JéNORME
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2 octobre 2018

LE SENTIER DU BAROQUE (74)

Le Sentier du Baroque... Tout un programme.
Enfin, je dis ça, peut être que je me trompe. On va bien voir.

Quand soudain, ne voilà-t-il pas...


Pas plus plus tard que l'autre jour, je suis tombé sur un article de Connaissances des arts qui parlait de la restauration loupée de trois oeuvres des XVème et XVIème siècles.

restauration loupée

Force est de constater que l'Espagne a un gros problème avec ses restaurateurs.
Souvenons-nous, en 2012, c'était à Borja, ville située à une soixantaine de kilomètres de Saragosse, que Cecilia Gimenez s'était proposée gracieusement pour restaurer une fresque centenaire du peintre Elias Garcia Martinez représentant le Christ, le "Ecce Homo".

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Jénorme est à Borja devant le Christ restauré

Si dans les premières semaines, cette échec artistique avait provoqué la consternation des autorités locales et l'hilarité du reste de la planète, le sanctuaire de Notre-Dame de la Miséricorde de Borja -où se trouve "la nouvelle oeuvre"- est devenu par la suite un lieu de pèlerinage touristique où des milliers de curieux vinrent ici pour admirer la restauration. La ville de 5 000 habitants a alors multiplier les initiatives pour capitaliser dessus, comme une exposition sur Elias Garcia Martinez ou un atelier qui permet de peindre sa propre version (ratée ou non) de l’Ecce Homo. Un opéra comique a été imaginée en 2015 par deux Américains, Andrew Flack et Paul Fowler. Musicalement, elle va « de musique vieille de 700 ans à de la musique vieille de 7 minutes », dit Andrew Flack, des chants religieux au rock actuel. En 2016, c'est une pièce de théâtre qui voit le jour et on ne parle pas des multiples produits dérivés (crêpe, T-shirt, casquette, coque, cravate, ...)...

crêpet shirtbougiebraceletaction mancasquettecoquecravatedéco noëlmug

...et autres sites internet qui te proposent de restaurer toi-même le Christ...

restauration 1restauration 2restauration 3restauration
Source : Huffington Post

Il faut savoir que tout ceci rapporte de l'argent, certes, mais est redistribué "en fonction".
"Par conséquent, le 14 août 2013, l’avocat engagé par Cecilia Gimenez a négocié un accord attribuant à celle-ci 49 % des droits d’exploitation industrielle et intellectuelle de «son» Ecce Homo. Des revenus que, selon lui, elle «destine à des œuvres caritatives». Quant à la fondation municipale propriétaire du sanctuaire, elle a eu la bonne idée de faire payer 1€ aux 57 000 curieux venus voir la restauration ratée et s’est engagée à en faire profiter la maison de retraite de Borja. Comme le résume Juan Maria Ojeda, «personne ne veut se faire de l’argent en profitant de la situation !»."  LA CROIX

Alors, la question se pose : la restauration loupée de la statue de Saint-Georges, ainsi que celle de sainte Anne trinitaire, accompagnée de la Vierge et de l’Enfant Jésus saura-t-elle apportée son lot de sourires et de dons ?

En tout cas, c'est avec cette idée en tête de restauration loupée que je m'en suis allé découvrir le Sentier du Baroque, en Haute Savoie. Il y en a un aussi en Savoie, mais il est appelé Le Chemin du Baroque ; ce qui, convenons-en, n'a rien à voir, mais alors rien du tout ! Pourquoi pas La piste du Baroque aussi pendant qu'on y est ?!

Me voici donc au point de départ !
Enfin, c'est assez compliqué car lorsque l'on regarde le Sentier du Baroque en Haute Savoie, plusieurs itinéraires apparaissent et certains n'étaient pas vraiment sur ma route DONC j'ai du biaiser un peu en évitant de passer par là pour plutôt aller là, mais bon, il fallait que je prenne la voiture alors que normalement cela se fait à pied.

BON, EH HEIN !
Je fais ce que je veux !
Et voici une pseudo carte de l'itinéraire suivi.carte
Carte : Google maps


En gros, je pars de Cordon pour aller à Megève en passant par Combloux avant de redescendre sur Saint-Gervais-les-Bains pour atteindre le point de non-retour aux Contamines-Montjoie. Ce qui nous fait un total de 30,2 kilomètres pour une durée de marche en voiture d'environ 49 minutes. Si j'avais fait le même chemin à pied, il aurait fallu marcher 6h42.
Il existe cependant plusieurs itinéraires pour découvrir le Sentier du Baroque en partant de différents lieux sans arpenter l'asphalte :
               - Sentier du baroque au départ de Combloux
               - Sentier du Baroque en partant de Saint-Gervais pour Saint-Nicolas-de-Véroce
               - Sentier du Baroque de Combloux aux Contamines

Bon eh, on va pas y passer la nuit. Tu fais comme tu veux. Moi, je pars de Cordon pour aller jusqu'aux Contamines-Montjoie, et plus si affinités !
Mais avant de commencer ce nouveau périple, une question te vient peut être à l'esprit : qu'est-ce que le baroque ?
Je t'avouerai que je me la pose aussi. De prime abord, le baroque, c'est des églises d'extérieur classique avec des retables et des sculptures à l'intérieur, mais des retables et des sculptures très chargées et très colorées.
C'est un peu sommaire. Tentons de développer un peu plus.

 

LE BAROQUE
Qu'est-ce que quoi ?
Et bim !
T'en veux ? En v'là !

Saint-Nicolas-de-Véroce, église, intérieur (74)

On va tout de suite se séparer des jeux de mots à la con style "Baroque and Roll", "Baroque en stock", "Baroque in chair"... Oh, il est bien celui là, "Baroque in chair"... Non, on 'sen fout ! Allons à l'essentiel.

"Le baroque est un courant artistique qui utilise exagérément le mouvement et la grandeur, avec exubérance, dans la sculpture, la peinture, l'architecture, la littérature, la danse, et la musique.

Ce style dit 'baroque' a commencé autour de 1580, à Rome, en Italie, et à été ensuite étendu à la plupart de l'Europe. Les idées germinales du baroque se retrouvent dans le travail de Michel-Ange.
La popularité et le succès du style baroque ont été encouragés par l'Église catholique romaine qui avait décidé, à l'époque du concile de Trente, en réponse à la Réforme protestante, que les arts devraient communiquer sur des thèmes religieux et avoir une implication directe et émotionnelle.
L'aristocratie a également vu le style dramatique de l'architecture et de l'art baroque comme un moyen d'impressionner les visiteurs et d’exprimer sa puissance triomphante. Les palais baroques étaient construits autour d'une entrée du même style que celle des tribunaux, de grands escaliers et de salles de réception à l'opulence de plus en plus grande au cours du temps.
Le mot baroque est dérivé du mot portugais 'barroco' qui se réfère à une 'perle rugueuse ou imparfaite' mais il est plus certainement entré dans la langue française par le latin ou l'arabe ou à partir d’une autre source. En 1911, on pensait que ce terme était dérivé du mot espagnol 'barrueco', c'est-à-dire une grande perle de forme irrégulière, et qu'il avait été utilisé pendant un moment dans le métier de bijoutier. En effet, certaines perles naturelles qui s'écartent des formes habituelles, régulières, sont connues comme des 'perles baroques'. D'autres le font dériver du terme 'baroco', une forme soi-disant difficile de syllogisme, en logique scolastique. Comme la plupart des désignations périodiques ou stylistiques, le mot 'baroque', a été inventé par les critiques ultérieures plutôt que par les praticiens de l'art dans les 17es et débuts du 18e siècle.

Le terme ''baroque' a d'abord été utilisé dans un sens péjoratif, pour souligner les excès et pour décrire une redondance excentrique et l'abondance de détails qui contrastaient fortement avec la rationalité claire et sobre de la Renaissance. Même si on a longtemps pensé le mot comme un terme critique, il a d'abord été appliqué à l'architecture. En fait, il apparaît plus tôt dans le domaine de la musique, de façon anonyme, dans une revue d'octobre 1733 de Jean-Philippe Aricie de Rameau Hippolyte, et est imprimé dans le Mercure de France en mai 1734. La critique implicite de la nouveauté dans cet opéra était 'du baroque', se plaignant que la musique manquait de mélodie cohérente, était remplie de nombreuses dissonances, sans cesse modifiées. Une critique de la vitesse dans la composition.
Dans son acception moderne, le terme 'baroque' peut encore être utilisé, généralement d’une façon péjorative, décrivant des œuvres d'art, de l’artisanat, ou la/une conception que l’on pense 'à ornementation excessive' ou comme synonyme de 'byzantin', pour décrire la littérature, des logiciels, des contrats, ou des lois qui sont censés être excessivement complexes, indirects ou obscures et qui peuvent dissimuler ou mettre de la confusion dans leur sens. Le mot 'baroque' peut simplement signifier que quelque chose est complexe, avec de nombreux détails, sans référence au style baroque des 17e et 18e siècles.
Le mot a d'abord été réhabilité par l'historien d'art d'origine suisse Heinrich Wölfflin dans son oeuvre 'Barock and Renaissance', en 1888. Wölfflin a identifié le baroque comme un 'mouvement importé en masse', un art antithétique de l’art de la Renaissance. Il n'a pas fait la distinction entre maniérisme et baroque que les écrivains modernes font et il a ignoré la phase ultérieure qui a existé au 18e siècle."  ART BAROQUE

En gros, et pour résumer tout ceci en une phrase : l’art baroque, né en Italie, exprime le renouveau du catholicisme après le concile de Trente (1545-1563). Il représente la foi joyeuse, en opposition à la rigueur protestante. Il se diffuse dans les Pays de Savoie dès la fin du XVIIe siècle et durant tout le XVIIIème siècle.
Tu l'as peut être compris : le Sentier du Baroque va nous amener à visiter quelques églises de la région, mais des églises à l'architecture baroque caractérisées par l'opulence. Une opulence qui se traduit par les progrès techniques du XVIIème siècle avec les avancées en statique, des nefs qui s'élargissent, et adoptent même des formes rondes. L'ornementation "à outrance" sera également au rendez-vous avec l’usage de faux marbres et du stuc, en particulier avec un usage généralisé des marbres polychromes. Il y aura aussi des sculptures d’anges et de putti joufflus et moqueurs, souvent dorés ; de même que des volutes, spirales, rocaille, cartouches, etc. N'oublions pas non plus les fresques couvrant l'intégralité du plafond apportant ainsi une touche de couleur ; ce qui permet très souvent "d'ouvrir" l'espace en y plaçant un ciel, donnant l'impression d'une architecture à ciel ouvert. De là, le baroque ne recule pas non plus devant le recours au trompe-l'œil, en particulier en intégrant peinture et architecture.
Ici, nous allons nous intéresser à l'art baroque savoyard, qui s'est développé dans l'ancien duché de Savoie à partir du milieu du XVIème siècle jusqu'à la seconde moitié du XVIIIème siècle. Ce mouvement a connu un véritable dynamisme dans les églises de Savoie entre 1650 et 1770, où l’"on baroquise [surtout] à la hâte des églises anciennes".
Les États italiens voisins, comme l'Empire germanique, les royaumes de France et d'Espagne, ont apporté une part significative à cet art qui sut se suffire à lui-même pour s'émanciper et constituer à son tour un style bien à part.
À la suite de ce mouvement, dans la seconde moitié du XVIIIème siècle, la Savoie verra ensuite l'avènement du néoclassique qualifié de "sarde".
En faisant ce périple quelque peu improvisé, je vais en profiter pour voir s'il n'y a pas, comme en Espagne, quelques erreurs de restauration.


ALLEZ !

 

Rappelons-le, mais nous l'avons déjà vu dans un précédent billet, Cordon est un charmant village savoyard, surnommé "Le balcon du Mont Blanc" pour sa position stratégique qui permet de boire une suze-cassis en admirant le plus haut sommet d'Europe occidentale.

Cordon, suze cassis

Mais aujourd'hui, point de Suze-cassis ! Aujourd'hui, c'est baroque ! Je commence ma tournée du baroque par l'église de Cordon, prénommée Notre-Dame-de-l'Assomption.

 

CORDON
NOTRE-DAME-DE-L'ASSOMPTION
Cordon, église Notre-Dame-de-l'Assomption et Mont Blanc

Cordon, c'est d'abord un panorama. Plusieurs chemins de randonnée partent d'ici pour offrir des vues magnifiques sur la chaîne du Mont Blanc et les aiguilles de Varan.

Cordon, vue sur le Massif du Mont Blanc

Cordon, vue sur Sallanches et les aiguilles de Varan (74)

Et quand le temps se couvre...
Cordon, Mont Blanc dans les nuages (74)
...pourquoi ne pas entrer
dans la petite église de Notre-Dame-de-l'Assomption.
Cordon, église Notre-Dame-de-l'Assomption, clocher et Mont Blanc (74)

Érigée de 1781 à 1787, Notre-Dame-de-l'Assomption interpelle tout d'abord l'attention du randonneur par son clocher à bulbe à lanternon original. Recouvert d'acier "patiné" (peint à chaud) afin d'imiter au mieux la rouille d'un fer blanc de 1816, il domine un ensemble extérieur très sobre, ne laissant rien présager de la décoration intérieure.
La foudre s'est abattue sur le clocher en 1973. L'incendie et l'eau utilisée pour l'extinction causèrent d'importants dégâts. nécessitant l’intervention des Monuments historiques qui classèrent l’édifice en 1974 et financèrent sa reconstruction ainsi que celle de la toiture.

ENTRONS !
Cordon, église Notre-Dame-de-l'Assomption, intérieur (74)

Alors oui, n'ayons pas peur des mots, hein, on est entre nous : force est de constater que le baroque veut éblouir. Les effets de lumière et de mouvement sont au rendez-vous. Le mobilier, les peintures et l'architecture en mettent plein la vue ! Il y a de la dorure, de la feuille d'or, du bous sculpté, de la polychromie !

Cordon, église Notre-Dame-de-l'Assomption, retable (74)

Ce retable impressionnant de grandeur et d'ornement rappelle que l'art baroque savoyard s'affirme d'avantage à travers la peinture et la sculpture, notamment autour des retables, plus qu'à travers l'architecture proprement dite.

D'ailleurs, en levant les yeux au ciel, je découvre les fresques empruntant au ciel son azur, au sang, sa pourpre, à l’or, sa lumière.
Ces fresques
représentent des scènes de la vie de Jésus Christ et de Marie, en particulier celles des mystères du rosaire. La coupole montre les mystères joyeux de la venue du Christ, l'avant-chœur les mystères douloureux de la Passion et la nef les mystères glorieux de la Résurrection. En outre, la Cène et le sacrifice d'Isaac sont peints dans le chœur et les quatre évangélistes dans les pendentifs de la coupole.
Les peintures ont été restaurées en 1978-82 et l'église a été à nouveau rénovée entre octobre 2009 et juillet 2011.

Cordon, église Notre-Dame-de-l'Assomption, intérieur, peinture (74)

"Un sentiment très fort de beauté, tout en suggérant que cette beauté terrestre
n’est qu’illusion devant la vraie beauté du monde divin."
CORDON.FR

Cordon, église Notre-Dame-de-l'Assomption, intérieur, peinture

Et puis, je calme un peu mon regard en parcourant les murs de l'encenite religieuse sur lesquels parfois, je m'amuse avec quelques objets "rigolos".

Cordon, église Notre-Dame-de-l'Assomption, intérieur, détail (74)

Officiellement, l'édifice est classé au titre des monuments historiques par arrêté du 5 mars 2004.

Bon ben OK. Je ne remarque aucun défaut de restauration DONC je sors.

 

Je quitte Cordon, son église et son panorama pour emprunter une route étroite et sinueuse, nommée Route de Barthoud. Des chalets discrets sans clôture parsèment cette campagne en pente, arborée d'une belle herbe tendre et verte, quelques fois à l'ombre de quelques résineux.
Je rejoins la départementale 1212... Ouaaaaaiiiss : j'aime le 12 et là, tu en as deux dans un seul chiffre ! Cette départementale permet de relier Sallanches et sa vallée Blanche à Albertville en passant par Flumet, situé également sur la "route des Grandes Alpes". C'est aussi sur cette départementale, à l'entrée de Combloux, que je rencontre un magnifique rond-point sur lequel les autorités locales ont posé un bout de télésiège.

 COMBLOUX
Combloux, rond-point

Mais ooooh eh attention : Combloux, ce n'est pas qu'un bout de télésiège sur un rond-point. Non, non, non. Sinon, on ne comprendrait pas pourquoi, lors de sa venue dans le village au XIXème siècle, Victor Hugo aurait désigné Combloux comme "la perle des Alpes dans son écrin de glaciers". C'est vrai, imagine. Victor Hugo est là, il arrive de Paris ou de Normandie ou de Gavarnie ou d'Espagne... il voyageait beaucoup cet homme... Il arrive à Combloux, il voit le rond-point avec un morceau de télésiège dessus et là : il s'arrête, s'asseoit sur le bord de la route, fixant du regard ce monument routier et soudain, inspiré, il dit "Combloux est vraiment la perle des Alpes dans son écrin de glacier." Hein ? Non, ce n'est pas possible parce que les ronds-points n'existaient pas à l'époque.
BREF : Combloux, ce n'est pas qu'un bout de télésiège sur un rond-point à l'entrée nord du village.

Combloux,
c'est aussi un plan d'eau biotope.
Combloux, lac biotop, parasols et vallée blanche (74)

Ah mince, j'ai mal cadré, on ne voit pas le lac.
On ne voit que les parasols et la ville de Passy derrière avec le viaduc des Egratz.
Je recommence.
Combloux, lac biotop (74)

Mais qu'est-ce qu'un lac biotope ?
Bonne question, bravo et merci. Une réponse s'impose à présent. Écoutons ce que nous dit le site internet de la ville.
"Un plan d'eau conçu pour la baignade dans une eau limpide, pure et sans produits chimiques, réchauffée par les rayons du soleil jusqu'à 26°C. Attention : Seuls les slips de bain et boxers sont autorisés. Les caleçons et shorts de bain sont interdits.
Le premier plan d'eau écologique ouvert à la baignade en France depuis 2002, dans un panorama à couper le souffle, face au Mont-Blanc... Plutôt qu'une eau chlorée de piscine, l'eau naturelle prélevée sur le réseau d'eau potable est réchauffée par les rayons du soleil jusqu'à 26°C.
Plus de 10 000 plantes aquatiques, un jet d'eau, et un petit ruisseau en cascade permettent d'assurer une qualité d'eau irréprochable aux 1500m² de baignade. Chauffée naturellement par les rayons du soleil, la température de l'eau varie entre 19°C et 26°C, grâce à une bâche tendue au fond du bassin de baignade, avec un accès en pente douce idéal pour les enfants. Le plan d'eau est situé au centre du village dans un paysage alpin préservé de toute architecture "bétonnée". Le plan d'eau est bordé d'un solarium en bois et d'une plage engazonnée et un bar restaurant.
Pour permettre aux plantes d'effectuer leur travail dans de bonnes conditions et avoir une qualité d'eau optimum, le nombre d'entrées journalières au plan d'eau est limité à 700. Réservation conseillée."  COMBLOUX.COM

Bon, voilà. Ça donne envie, mais nous ne sommes pas venus ici pour ça. Nous sommes ici, à Combloux, pour évoluer sur le Sentier du Baroque. DONC direction l'église. Et en prenant la direction de l'édifice religieux, nous pouvons nous interroger sur l'éthymologie du nom Combloux. Si, si, on peut.
Issu du mot latin cumulus ("amas, surplus"), Combloux serait un toponyme dérivé de l'ancien français comble désignant un sommet.
Mais ce serait trop simple et incertain. De mon côté, je préfère retenir la seconde interprétation.
En effet, la commune est mentionnée dans une charte de 1284 du prieuré de Chamonix et réalisée par le curé de la paroisse, un certain Jacques, curé de "Comblo". Sur le parchemin, le curé utilise un sceau où l'on aperçoit aujourd'hui les restes de pattes avant d'un loup. L'animal était l'emblème de ce curé dont il jouait avec l'étymologie "combe du loup". L'église est attestée sous la forme Comblou vers 1344.
Et voici un bel enchaînement car j'arrive devant l'église de Combloux.

COMBLOUX
Église Saint Nicolas
Combloux, église Saint-nicolas, clocher (74)

Oui, je sais : on ne voit pas grand chose, mais je n'ai pas fait de photo de l'église dan son ensemble car je n'avais pas assez de recul. Remarquons tout de même que cette photo nous permet de constater que l'église de Combloux, comme celle de Cordon, possède un clocher à bulbe.
Entrons dans les détails.
L'église est dédiée à Nicolas de Myre, d'où son nom église Saint-Nicolas. C'est important de savoir pourquoi les choses s'appellent ainsi et comment, et pourquoi. Alors, bien sûr, la grande question qui se pose une fois de plus est : mais qui était ce Nicolas de Myre, bon sang de bonsoir ? Tiens, quelle expression étrange ?! Cela faisait longtemps que je ne l'avais pas utilisée. Mais d'où vient-elle ? Qui l'a prononcée la première fois et à quelle occasion et pour qui ?

LE MONDE ÉTRANGE DES EXPLICATIONS DES EXPRESSIONS
"Toutes les expressions commençant par "Bon sang" font référence à un juron datant du XIVe siècle, "par le sang de dieu" (déformé ensuite en "Palsembleu!", moins blasphématoire.) Dès le XIXe siècle, on voit apparaître dans la même veine : Bon sang de bon soir ! Bon sang de bois ! Bon sang de bon dieu !"  NOTRE FAMILLE.COM

Bon, parfait. Et puisque nous parlons de dieu, revenons à notre église et répondons enfin à la question "Mais qui était Nicolas de Myre ?"

NICOLAS DE MYRE
saint NicolasNé à Patare, en Lycie (actuelle Turquie), vers 270, Nicolas, selon la légende, aurait reçu très jeune le baptême et se serait tenu tout seul debout en signe de respect, bien droit sur ses jambes, pour être baptisé : ce fut son tout premier miracle. Puis, il se met à jeûner en refusant de téter aux jours prescrits par l’Église (mercredi et vendredi).
D'autres miracles suivront, comme celui du blé. Pour sauver les populations de Myre de la famine, Nicolas se rend dans un port voisin apprenant que des bateaux s'y sont arrêtés pour échapper à une tempête. Il parvient à convaincre les armateurs de décharger un peu de leurs précieux grains en échange de la promesse que chacun des bateaux arriverait à bon port. À l'arrivée des bateaux à Constantinople, on mesura le blé et il y en eut la même quantité qu'au départ. Émerveillés, les matelots racontèrent le prodige.
Toujours en rapport avec la marine, un autre miracle survint lorsque des matelots sur le point de mourir lors d'une tempête sur la côte de Lycie, font appel à Nicolas pour venir à leur secours. L'évêque apparaît alors sur le navire. Il les rassure et les exhorte au courage. Lui-même aide à la manœuvre des voiles et s'empare du gouvernail. Il les conduit ainsi au port et disparaît sous leurs yeux. Les matelots s'empressent alors de se rendre à Myre, y reconnaissent leur sauveur au milieu de ses clercs et tombent à ses genoux.

D'autres miracles suivront, ainsi que des apparitions après sa mort.
Il a été proclamé protecteur de nombreuses nations et de nombreux corps de métiers. Patron des marchands, des enfants et des mariniers, il est difficile de retrouver les traces les plus anciennes du culte de saint Nicolas en raison de la Querelle des Images qui a fait disparaître la quasi totalité des représentations imagées des saints datant d'avant le VIIIème siècle. On sait cependant que le saint bénéficie très tôt d'une grande popularité ; cela est notamment visible dès le IXème siècle par son omniprésence dans l'iconographie des églises d'Orient. Il meurt à Myre le 6 décembre 345.
Nicolas de Myre est plus connu sous le nom de Saint-Nicolas. Le 6 décembre, jour de commémoration de sa mort, il distribue des cadeaux à tous les enfants sages dans plusieurs pays européens du Nord et de l'Est de l'Europe (notamment la Belgique, le Luxembourg, le Nord et l'Est de la France surtout en Lorraine et en Alsace, les Pays-Bas, l'Allemagne et la Suisse).

ENTRONS À PRÉSENT
DANS L'ÉGLISE !


Quelques notes d'orgues raisonnent, un peu en désordre. C'est un homme qui est là, assis devant l'instrument, et qui semble faire ses gammes, peut être pour un concert prochain. Revenons à l'église.
Classée Monument historique, l'église Saint-Nicolas de Combloux a été reconstruite en 1701, puis consacrée en 1704, avant que son clocher ne subisse kes assaut de la foudre pour être reconstruit en 1829. Sous le auvent, nous retrouvons la légende de Saint-Nicolas. Mais ce qui frappe le plus, c'est l'imposant retable en bois et sa toile du XVIIème siècle, Le Martyre de Sainte Apolline, classés Monuments Historiques également.

Combloux, église Saint-nicolas, retable

Je regarde d'un peu plus près...

Combloux, église Saint-nicolas, retable, détail (74)             Combloux, église Saint-nicolas, retable, détail

Un autre retable en bois et sa toile représentant deux évêques sur fond de paysage avec anges, du XVIIème siècle. L'église contient par ailleurs : une toile restaurée du XVIIIème siècle représentant trois personnages, dont saint Pierre. Ces éléments sont tous classés Monuments Historiques.

Bon ben OK. Je ne remarque aucun défaut de restauration DONC je sors.

Je contourne l'église de Combloux pour passer devant son portail monumental en granit et son cadran solaire, le plus ancien du pays du Mont-Blanc.
Le temps s'est légèrement couvert. La chaîne du Mont Blanc a disparu dans les nuages. Seule, par moments, l'Aiguille du Midi sort son épingle du jeu des nuages.

Combloux, vue sur l'Aiguille du Midi dans les nuages (74)

Ouh putain, mais quel poète là ohlalalalalalala : l'Aiguille du Midi qui sort son épingle du jeu de nuages !!!! Pouaaahhhh lalalalalala !!!!

Photo 034Et dire qu'il y a six ans,
j'étais là-bas, sur ce pic
avec un schtroumpf...

 

 

 

 

 

Bon, bref : continuons !
Je quitte Combloux pour aller m'aventurer jusqu'à des hauteurs sur lesquelles repose la ville de Megève. Megève... Je sais pas, ça ne me fait pas trop rêver comme ville ou village. On en entend tellement parler comme étant la station de ski de la jet set et autres milliardaires russes fortunées qui dépensent sans compter dans les magasins de fringues, restos et autres. C'est également la station la plus chère de France pour acheter un bien immobilier.
Je vais quand même un peu, par curiosité, aller traînailler dans les rues, comme ça, pour voir ce qu'est devenue cette ville depuis que la famille a décidé d'en faire son lieu de villégiature en 1910.

"La station de sports d'hiver de Megève a été créée dans l'entre-deux-guerres par une branche des Rothschild. En effet, Noémie de Rothschild, épouse du baron Maurice de Rothschild, pendant la Première Guerre mondiale, est choquée de fréquenter les Allemands dans les stations suisses, notamment Saint-Moritz, et s'engage donc à trouver un lieu en France pouvant accueillir l'aristocratie européenne sans avoir à fréquenter les ennemis d'hier. (...) La baronne fait l'acquisition de terrain et fait construire des hôtels, notamment de luxe au Mont d'Arbois, dès 1921. (...) En 1920, il y avait 5 hôtels, ils sont 25 neuf ans plus tard." WIKIPEDIA


Je gare la voiture à la sortie de la ville, puis je redescends vers le centre-ville en suivant de loin l'approche du clocher de l'église Saint-Jean-Baptiste. Effectivement, il y a beaucoup de boutiques de luxe, des devantures soignées et des rues tellement propres qu'on pourrait manger par terre si vraiment on a envie de bousculer l'ambiance retenue de l'endroit. Ici, à Megève, il y a trois restaurants étoilés : "Flocons de sel" (3 étoiles), "1920" (2 étoiles) et "La table de l'alpaga" (1 étoile). Je dis ça parce que j'aime bien m'arrêter devant pour lire les menus.
Regardons, par exemple, aux "Flocons de sel" et remarquons ce Biscuit de brochet et lotte "du Leman pêcheur Eric Jacquier" Jus d’oignon grillé, mélisse, lierre terrestre, ou encore les Langoustines taillées au couteau, marinées au cédrat et lamier blanc Caviar sélection ER Vivifié de pamplemousse et racines de gentiane. Au "1920", on découvre le Filet de veau de lait grillé à l’ail des ours Pommes de terre grenaille cuisinées au lard d’Arnad et girolles.
Voilà, bon, eh hein, nous, on est venu faire le sentier du Baroque DONC l'église qui dresse fièrement son clocher sur la grande place de l'église... justement.


MEGÈVE

Église Saint-Jean-Baptiste
Megève, clocher de l'église en travaux (74)

Ben ouais, pas de bol : ce jour là, le clocher était touché par la grâce des travaux ; ce qui ne nous permet même pas de voir l'immense carillon à 11 cloches, dont la plus grosse pèse 3000 kilos.

fuseauMais il n'y a pas qu'une église,
il y a aussi le magasin AAllard,
créateur du fuseau en 1930
ici même à Megève.
On trouve aussi Hermès, Lacoste,
des parfumeries et la mairie.

 

 

 

 Entrons dans l'église.
Megève, église Saint-Jean-Baptiste, intérieur (74)

Contemporaine du Prieuré fondée par les Bénédictins vers 1085, l'église est composée de trois parties correspondant à trois époques.
"Un premier édifice, dont la date de construction reste inconnue, est mentionnée à Megève dès 1202. Les trois parties principales du bâtiment actuel renvoient à trois époques différentes :
- le choeur, de style gothique tardif, remonte à la fin du XIVème siècle
- la nef, quant à elle, a été entièrement reconstruite à la fin du XVIIème siècle
- l'avant nef, enfin, a été ajoutée dans les années 1870
Les voûtes, datant de 1828, sont ornées de peintures de l'Italien Mucengo. Endommagée par l'humidité, elle est restaurée en 1859 par le peintre FerrarisJ.B Ferraris
Le clocher à bulbe a pour sa part été érigé au XVIIIème siècle et partiellement reconstruit durant la restauration Sarde. Le chemin de croix émaillé avec des oxydes métalliques précieux date de 1956 et est l'oeuvre de Georges Gimel.
Les vitraux datent de 1959. L'orgue, inauguré en 1842 est dû aux frères Joseph et Claude-Ignace Callinet, membres d'une lignée réputée de facteurs d'orgue qui a marqué l'époque pré romantique.
Depuis sa restauration en 2004 ce magnifique instrument a retrouvé en grande partie la physionomie et les caractéristiques qu'il possédait à l'origine."  MEGEVE.COM


Bon ben OK. Je ne remarque aucun défaut de restauration DONC je sors.

Je retourne à la voiture et je repars.
Redescente vers Combloux, puis tourner à droite pour parcourir la D909 jusqu'à Saint-Gervais-les-Bains. Saint-Gervais-les-Bains, Saint-Gervais-les-Bains, deux minutes d'arrêt. Je me gare non loin de l'église dont l'extérieur est différent des églises visitées précédemment.

SAINT-GERVAIS-LES-BAINS
Église Saint-Gervais
Saint-Gervais-les-Bains, église (74)

Il faut dire qu'elle a complètement été restaurée en 2016.
Le clocher, repose sur les fondations du XIIème siècle. Il sera détruit par la foudre en 1792 et refait en 1819, sous la restauration Sarde, dans le style savoyard du clocher à bulbe, mais on ne le voit pas très bien sur la photo. On ne le voit même pas du tout.

De style baroque, est édifiée sur l'emplacement d'une église primitive du XIIème siècle.
Façade blanche ornée de quelques peintures et autres phrases latines, telles que "Ego mater pulchrae bonitatis" ("Je suis la mère de bonté"), ou encore "Qui mariam invenerit inveniet vitam" ("Qui trouve Marie trouve la vie"), ou encore "Fundamenta eius in montibus sanctis" ("Fondation dans les montagnes sacrées"). Le portail à ouverture plein cintre est surmonté d'un fronton et d'une niche abritant la statue de la Vierge.
L'église est dédiée à saint Gervais, martyr du Ier siècle, avec son frère jumeau saint Protais. Fils de saint Vital et de sainte Valérie, ces deux Saints moururent martyrs sous Néron, à Milan, au Ier siècle . Saint Gervais fut battu jusqu’à ce qu’il expirât sous les coups et saint Protais, frappé de verges, eut ensuite la tête tranchée. Les corps des deux Saints restèrent longtemps cachés : ils furent découverts au temps de saint Ambroise.

"Et, bien que trois siècles et plus se fussent écoulés depuis la mort des deux Saints, leurs corps étaient aussi intacts que s’ils n’étaient là que depuis la veille. Une odeur délicieuse s’en exhalait. Un aveugle, ayant touché le cercueil, recouvra la vue, et bien d’autres malades furent guéris par l’intercession des deux Saints."  LES CAHIERS DE CASSICIACUM

Leurs corps sont conservés dans la basilique de Milan, la Basilique Saint-Ambroise.

Je m'approche du retable.
Saint-Gervais-les-Bains, église, retable (74)

Le retable date de 1822. Son tableau est une Vierge à l'Enfant entourée de St Gervais, St Protais, St Etienne et St Bernard de Menthon. Situé juste devant le retable, le tabernacle est orné d'un pélican, symbole de l'Eucharistie.
Neuf vitraux contemporains, réalisés par l'artiste Kim En Joong ornent désormais l'église de Saint-Gervais.

Là aussi, je ne remarque aucun soucis de restauration DONC je sors.

 

Je retrouve la voiture, mais cette fois-ci, j'ai envie de m'éloigner de l'urbanisation. Enfin, bon, ce n'est pas que ce soit très urbanisé dans les parages, mais j'ai envie d'emprunter des routes un peu plus sommaires et vagabondes, se glissant dans la pampa savoyarde... Hein ? Ah oui, ça ne se dit pas. C'est un oxymore.
Bon, alors disons que je vais maintenant prendre de plus petites routes montagneuses.
Pour se faire, prenons la direction des Contamines-Montjoie. La route n'a plus de chiffres. Elle s'appelle simplement "Route des Contamines-Montjoie" et mène à une impasse au bout de laquelle se trouve la mystérieuse église de Notre-Dame-de-la-Gorge qui, parait-il, est l'une des plus surprenante église baroques de la région.
Ici, le sentier du Baroque retrace à travers toutes ces richesses religieuses l'histoire d'un peuple d'immigrés heureux ou malheureux. Les artisans et artistes italiens sont venus surtout de la Val Sesia pour construire et décorer églises, chapelles et oratoires.

La route est sinueuse, virages à 90° pour prendre de l'altitude et passer de 571 mètres à  je-ne-sais-pas-combien. Dans l'auto-radio -ça ne se dit plus- un morceau de Feloche, Silbo. Parfait ! Je crois à ces coïncidences, belles et correspondantes pour te soutenir dans ton élan incertain...

Profitons-en pour parler de ce langage qu'est El Silbo (le siffelment en espagnol) :
"Le langage sifflé de El Silbo est utilisé depuis des temps immémoriaux sur l’île de La Gomera aux Canaries pour communiquer sur de longues distances. Cela n’est pas une série de codes prédéfinis qui servent à exprimer un contenu limité, mais un langage articulé, réducteur, non conventionnelle, où vous pouvez échanger un nombre illimité de messages en sifflant les caractéristiques sonores d’une langue parlée.
Les habitants de l'île volcanique de La Gomera communiquent encore de nos jours avec ce langage à travers les larges vallées de l'île. Il s'agit d'une langue dans laquelle les différents éléments significatifs sont obtenus avec des sifflements de différentes tonalités et de différentes longueurs. Malgré un vocabulaire restreint, des conversations entières peuvent être sifflées. C'est la forme de communication au niveau sonore le plus élevé sans aide extérieure (amplification) ; la portée de ces sifflements peut atteindre huit à dix kilomètres.
El Silbo possède une valeur exceptionnelle en tant que signe du génie créateur humain. En plus d’avoir été adapté et développé pour faciliter la survie dans un environnement très particulier, ses utilisateurs ont donnée une grande complexité technique et esthétique à ce langage quasi musical."  LAGOMERA TRAVEL

Pendant ce court temps, je passe dans un petit village tout en longueur : Saint-Nicolas-de-Véroce. Véroce, féroce ? Non, ça a l'air plutôt calme et tranquille.


Saint-Nicolas-de-Véroce, croix et montagnes (74)Sur le bord de la route,
une Vierge sur une croix métallique
me tend les bras.
Derrière elle, le Mont Blanc se fait humble
en se cachant dans les  nuages.

 

 

 

 

Je m'arrête, histoire d'aller voir cette église bien blanche et imposante. Il s'agit de l'église Saint-Nicolas-de-Véroce. Tout simplement. Bon, là, ça va être difficile de s'en rendre compte car j'ai omis de prendre une photo de l'extérieur de l'église. Prenons une image de Street view...

église

Hein, eh, ça se voit. Comme ça, on se dit : mais pourquoi aller visiter l'intérieur de cette église qui semble n'être qu'une grosse masse blanche uniforme ? Hein ? Hein ? Hein ? Mais si, on se dit ça ! Eh bien, nous allons quand même y aller et entrer car, oui, que tu le veuilles ou non, nous sommes toujours sur le Sentier du Baroque.
J'entre et c'est un spectacle de couleurs qui s'offre à mes yeux. Plein les yeux ! Un véritable feu d'artifices !!!

 

SAINT-NICOLAS-DE-VÉROCE
Saint-Nicolas-de-Véroce, église, intérieur

Ce qui frappe une fois de plus, c'est la différence entre extérieur et intérieur. C'est coloré, c 'est chargé, c'est silencieux.un peu d'histoire et d'explications.

L'église est dédiée à Nicolas de Myre. Oui, le même que celui de l'église de Combloux DONC nous ne referons pas sa biographie.
Elle n'est attestée qu'en 1280, tout en supposant qu'elle puisse être bien antérieure. Il semble que l'église ait reçue au XIème siècle une relique du saint, un os du poignet, qui est enchâssé dans un bras reliquaire, devenant un pôle de diffusion du saint pour la Savoie. La paroisse de Saint-Nicolas de Véroce était importante puisqu’elle se trouvait sur l’ancienne route du Piémont à Genève et au Valais.

La première pierre de l’église de Saint-Nicolas de Véroce fut posée en 1726. Elle fut construite par des artistes italiens provenant du Val Sesia, en lieu et place d’une très ancienne église qui menaçait de tomber en ruine. Grâce à l'apport financier de ceux qui ont migré (des colporteurs et des expatriés, partis dans les bas pays germaniques), elle est l’un des joyaux de l’art baroque alpin, caractérisé par un extérieur sobre et un intérieur éclatant de couleurs et reconnu pour le "bleu de Saint-Nicolas" ornant les voûtes peintes au XIXème siècle.
L'église possède sur sa voûte une peinture, du XIXème siècle, ayant pour sujet l'apothéose de saint Nicolas, réalisée par les artistes originaires de la Valsesia, Giuseppe Antonio et Lorenzo Avondo.

Saint-Nicolas-de-Véroce, église, intérieur, peinture

"La décoration baroque intérieure date du XVIIIe siècle et se compose des peintures d’une frise d’angelots, des croix de consécration, de la balustrade de la tribune, des trompes l’oeil des piliers, ainsi que des retables.
Cette décoration est enrichie au XIXe par les peintures néoclassiques d’Avondo qui illuminent la voûte. Les miracles de saint Nicolas, saint Patron de l’église, sont représentés au niveau de la coupole.
Les tableaux et les autres éléments de décor proviennent en grande partie des pays germaniques." SAINT GERVAIS.COM

Saint-Nicolas-de-Véroce, église, intérieur, le christ (74)          Saint-Nicolas-de-Véroce, église, intérieur, le christ

Elle reflète la ferveur religieuse de toute une vallée au début du XVIIIème siècle.
L'église est classée au titre des monuments historiques en 2006. D'autres objets se trouvant dans l'église font également l'objet de protection, mais nous ne les énumérerons pas ici. Mais nous pouvons lire l'histoire de ce "trésor" :
"C’est à monsieur le Curé Dumas que l’on doit l’aménagement, en 1955, du Trésor de Saint-Nicolas de Véroce. Ces objets, provenant tous de l’ancienne paroisse de Saint-Nicolas, sont dus en grande partie à la générosité et à la foi des habitants qui avaient été amenés à s’expatrier.
Entre le XVe et le XVIIIe siècle, les ressources du village ne suffisaient pas à faire vivre tous ses enfants. Certains d’entre eux durent partir, pour gagner leur vie comme colporteurs ou comme artisans. Quelques-uns se fixèrent à l’étranger, comme en Suisse, en Allemagne ou en Autriche et devinrent des personnages importants dans des villes telles que Vienne, Munich ou Ingolstadt. Les dons de ces Saint-Nicolatains pour leur paroisse, sous forme d’argent et d’objets religieux, étaient généreux car dédiés à la Gloire de Dieu et au salut de l’âme du donateur. Mais ils servaient aussi à affirmer l’importance sociale des colporteurs et des expatriés dans la vie communautaire du village.
Une bonne partie du Trésor aurait disparu à la Révolution si le Révérend David, curé de la paroisse (mort en 1811), ne l’avait caché dans le village." SAINT NICOLAS DE VEROCE

Saint-Nicolas-de-Véroce, église, retable et peintures (74)

Je viens d'apprendre que l'église a elle aussi victime de la foudre, mais très récemment (dans la nuit du 18 juillet). Ayant fait de nombreux dégats, l'édifice sera fermé plusieurs semaines, voire plusieurs mois, pour être remise en état.

Bon ben OK. Je ne remarque aucun défaut de restauration DONC je sors.

 

Je reprends la voiture pour poursuivre mon évolution dans cette étroite vallée devant me mener aux Contamines-Montjoie. Quatre kilomètres séparent Saint-Nicolas-de-Véroce des Contamines-Montjoie. C'est un nom original... Les Contamines-Montjoie... On pense à une sorte de joie contagieuse, un débordement de bonne humeur ; un lieu où tout le monde sourit. Mais, en fait, pas du tout. Non pas que les habitants, appelés les Contaminards, ne soient pas souriants, mais Contamines et Montjoie signifient tout à fait autre chose. Contamines vient du latin condominium signifiant "terre indivise" ou "domaine commun". Le nom de "montjoie" désigne un pilier en pierre érigé pour baliser un chemin. Il pourrait dériver également du germain mundgawi, désignant une "hauteur frontière avec poste militaire". Voilà, voilà.

Je traverse le village pour poursuivre mon avancée sur la route de Notre-Dame-de-la-Gorge, un autre nom intrigant. Quatre kilomètres plus loin, j'arrive sur un immense parking. Le bout du bout de la route de Notre-Dame-de-la-Gorge. Ce n'est pas seulement un lieu de pèlerinage, c'est aussi un point de départ pour de nombreuses randonnées, comme celles menant aux lacs Jovet ou aux Combes Noires.
Mais, nous, c'est le Sentier du Baroque qui nous intéresse. Je me gare. Je marche un peu sur un petit sentier parallèle au grand parking pour arriver devant Notre-Dame-de-la-Gorge.
Alors, une fois de plus, je n'ai pas fait de photo de l'extérieur de l'église. Heureusement, Street View est là.

 

NOTRE-DAME-DE-LA-GORGE
Notre Dame
Photo : Google Street View

Très mignonne et isolée, elle arbore un clocher carré à bulbe sur une nef unique.
Présente depuis au moins le XIème siècle, cette ancienne église paroissiale a été construite dans un style baroque entre 1699 et 1707. Elle est classé monument historique depuis 2015.
Un ermite se serait installé dès le Xème siècle à cet emplacement afin d'offrir un abri aux voyageurs. Dédié à Saint-Antoine, ce petit sanctuaire va devenir paroisse. Elle fût rebâtie en 1699 par Jean de la Vougniaz, un maître-maçon de la Valsésia qui venait d'achever la reconstruction de l'eglise de St Gervais.

Pendant la révolution française, l'église sert d'écurie, les cloches sont réquisitionnées pour faire des canons. La paroisse, en déclin depuis la création au milieu du XVIIIème siècle du hameau aujourd'hui du Chef-lieu, est supprimée en 1804 et rattachée aux Contamines. L'église devient un centre de dévotion marial. Le 21 août 1873, le pèlerinage marial rassemble près de 10 000 personnes venues de toute la région.
"Lieu de pèlerinage fort ancien, curieux oratoire de style baroque, couvert de fresques Renaissance et de dorures, dans la plus pure tradition de la Savoie religieuse..." écrit Roger Frison Roche dans Mont-Blanc aux sept vallées.
Chaque année, le pèlerinage du 15 Août à la Gorge draine une foule de fidèles.

J'avance à hauteur de l'entrée de l'église.
Sur la façade, une niche au-dessus de la porte contient une vierge à l'enfant polychrome. Le fronton supérieur percé d'un oculus comporte la devise EGO MATER PVLCHÆ BONITATIS ("C’est moi la mère du bel amour"). Deux cartouches de part et d'autre de la porte contiennent des devises : QVI MARIAM INVENERIT INVENIET VITAM ("Qui trouve Marie trouve la vie") à gauche et FVNDAMENTA EJVS IN MONTIBVS SANCTIS ("Elle est fondée sur les montagnes saintes", extrait du psaume 87) à droite.


ALLEZ, ENTRONS !
Les Contamines-Montjoie, église Notre-Dame-de-la-Gorge, intérieur

Étonnant ! Très chargé ! Beaucoup de dorures, d'objets ! Mais, en même temps, très confiné. On sent la pierre et l'humidité.
L'intérieur est orné de stucs et de trois retables dorés de style baroque au-dessus des autels. Celui du centre montre la Vierge de l’Assomption honorée par deux anges et tout en haut, Dieu le père avec à sa gauche la Vierge et à sa droite le Christ (les places de la Vierge et de Dieu ont été inversées au XVIIIème ou XIXème siècle).

Les Contamines-Montjoie, église Notre-Dame-de-la-Gorge, intérieur, le choeur (74)

Ce retable serait l’œuvre de Jacques Clairant, artiste chambérien. Les deux statues latérales (Saint-Bernard de Clairvaux et Saint-Antoine) ne sont pas d'origine. Sur le retable de gauche se trouvent des colonnes ajourées ainsi que la frise représentant les anges gardiens consolant les âmes du purgatoire.
Les piliers sont décorés de Croix de consécration reprenant les armes des Savoie. Une statue de Saint-François de Sales est installée dans l'un des piliers.

Les Contamines-Montjoie, église Notre-Dame-de-la-Gorge, intérieur

Les Contamines-Montjoie, église Notre-Dame-de-la-Gorge, retable, détail (74)

Les Contamines-Montjoie, église Notre-Dame-de-la-Gorge, intérieur (74)Une poutre de gloire
(la seule du Faucigny)
complète le chœur.


 

 

 

 

 

 

 

 

 

Je ressors de l'église les yeux un peu écarquillés, mais je ne remarque aucun défaut de restauration DONC je sors.


Un petit panneau indique la direction de la Sainte-Chapelle. Ça aussi, c'est intrigant. La Sainte-Chapelle ! On pense de suite à la Sainte-Chapelle de l'île de la Cité à Paris qui abrite la Sainte Couronne d’épines, un morceau de la Vraie Croix, ainsi que diverses autres reliques de la Passion.

D'autant que le sentier ne semble mener nulle part. Sur près de 200 mètres, je longe un torrent prénommé le Bon-Nant, creusant un vallon qui, dès le Ier siècle, fut un lieu de passage et de pâture, plus connu sous le nom de Val-Montjoie.

Les Contamines-Montjoie, église Notre-Dame-de-la-Gorge, et le Bon Nant(74)Il ne fut pas toujours bon le suivre puisque dans la nuit du 12 juillet 1892, une poche d'eau accumulée sous le glacier de Tête Rousse se rompit d'un seul coup, des milliers de mètres cubes d'eau s'engouffrent dans la combe de Bionnassay, détruisant en partie le village de Bionnay,
avant de s'enfoncer dans la gorge du Bon-Nant. L'établissement thermal qui se trouvait au débouché de la gorge fut emporté par la force du torrent qui charriait avec lui de la boue et des rochers. Le bâtiment fut complètement détruit et on compta près de deux cents victimes dans la vallée.

 

 

 

 

 

 

Après quelques mètres de marche, je parviens à la Sainte-Chapelle.

SAINTE-CHAPELLE
Les Contamines-Montjoie, Sainte-Chapelle, chemin (74)

Séparée du sentier par un pont, il me faut l'emprunter pour rejoindre l'entrée du petit édifice.

Les Contamines-Montjoie, Sainte-Chapelle (74)

Les Contamines-Montjoie, Sainte-Chapelle et le Bon Nant (74)         Les Contamines-Montjoie, Sainte-Chapelle, intérieur (74)

Petite chapelle isolée du monde accrochée au flanc de la paroi rocheuse, elle remplace une chapelle plus ancienne qui se trouvait au ras du Bon-Nant et fut emportée par une autre crue en 1914. Elle fut reconstruite en 1921. La tradition veut que le premier ermite de la Gorge, un moine bénédictin de Saint-Nicolas-de-Véroce, avait quitté sa communauté d'origine pour venir s'isoler au fond du vallon afin d'y mener une vie d'ermite.
Au Moyen-Âge, ce site religieux abritait une source miraculeuse, "la Sainte Fontaine". Elle jaillissait de la paroi rocheuse et possédait des vertus miraculeuses.
En dessous de la Sainte Chapelle, on distingue la statue de la Vierge abritée dans une cavité qui se nomme "marmite".
"Cette cavité naturelle a été creusée par les eaux bouillonnantes du torrent du Bon Nant à l’aide d’une pierre coincée dans une boucle et entraînée  en tourbillons par la violence de l’eau. Cette pierre tourne sans arrêt et creuse dans la roche tendre une véritable « marmite ». La pierre se transformera en sable et retournera dans le lit du torrent." LA SAINTE CHAPELLE

Aujourd'hui encore, le 15 août, jour de l'Assomption et le 8 septembre, anniversaire de la Nativité de la Vierge, une procession conduit les fidèles de Notre-Dame-de-la-Gorge à la Sainte-Chapelle.
Comme tu peux le voit sur la photo ci-haut, l'intérieur est sobre, très sobre. Juste un autel surmonté de quelques fleurs artificielles et mots.

En tout cas, je ne remarque aucun défaut de restauration DONC je sors.


Mais c'est dans ce lieu isolé et sobre que je termine mon périple Sentier du Baroque.
Je suis bien là, finalement.
Après ce déluge de dorures, de peintures, d'objets... ici, rien ou presque. Le bruit du torrent. Le vent dans les résineux. Les montagnes derrière lesquel même le soleil s'abaisse. Solitude. 

 

 

 

 

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