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LE VOYAGE DE JéNORME
LE VOYAGE DE JéNORME
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10 octobre 2012

LE PARC NATUREL DU SEIGNEUR DE BERTIZ (Espagne)

Dans notre épisode précédent, Jénorme tentait d'expliquer au monde entier du Sud-Ouest qu'il n'y avait pas que la montagne dans la vie.
C'est finalement après une démonstration de 2h15 qu'il décidait de se rendre dans une forêt pour le prouver.
Mais quelle forêt allait-il choisir ? Et comment s'y rendre ? Et pourquoi faire ? Et n'était-ce pas de la folie ? Et toi, comment ça va ?
Quand soudain, ne voilà-t-il pas...

 

Souviens-toi !
Dans le précédent épisode, je t'avais énuméré les différentes choses que tu pouvais faire si tu ne voulais pas aller en montagne.
En 1), nous avions vu que tu pouvais aller chercher ton courrier dans ta boite aux lettres.
En 2), tu avais pu découvrir qu'il était possible de se rendre à des concerts, comme ceux de Puppetmastaz ou d'Ibrahim Maalouf ; et ce, peut être, après avoir lu la revue Les Inrockuptibles.
Et ne voici pas que maintenant, le plus naturellement du monde, se pointe le point n°3 !

3) Tu peux aller te promener dans une forêt...
C'est alors avec un entrain certain et une conviction hors norme que je prends la route pour une forêt sud-ouestine.
J'aurais pu aller me perdre dans la forêt des Landes, mais c'était trop classique, trop facile, trop évident, trop courant, trop classique... ah merde, je l'ai déjà dit !
Pourquoi ne pas aller en Espagne afin de dépasser les clichés comme quoi dans ce pays il n'y aurait que des villages fantômes, la crise, des plages polluées, des tapas, de la sangria, des churros et des joueurs de tennis dopés.
 
Serais-tu alors tenté par un superbe jardin botanique, par la découverte d'essences rares comme le ginkgo de Chine, les séquoias de Californie, les châtaigniers des Balkans et les nénuphars ? Souhaiterais-tu rencontrer des merles, des écureuils ou des pics verts entre autres animaux sympathiques ? Aimerais-tu passer une journée paisible à l'écoute du coeur de la forêt ?

Toi : "- NON !"
Moi : " - Mais si, mais si ! Fais pas chier !"
Et cela tombe vachement pas mal puisque tout ceci est possible en se rendant au Parc Naturel du Señorío de Bertiz.
Tu veux des chiffres ? Tu aimes les chiffres ? C'est ta passion ?
Eh bien en voici des chiffres : 2040 hectares de végétation exubérante ! 125 espèces botaniques arborées et arbustives ! La présence d'oiseaux nidificateurs (46 espèces) et sédentaires (oiseau rampant bleu, mésange) !
Alors, t'as qu'à voir !
 

Je prends la bagnole qui, d'elle-même, prend la direction de Dancharia... Dantxaria... Dantxarinea... Danche... où, rappelons-le, il était toujours de bon ton de marquer un petit arrêt pour boire un Martini...

le guide du Danchard
Photo : Le guide du Danchard, à paraître bientôt prochainement

Puis passage du col d'Otxondo (632m). Traversée de Bozate. Attention : ne surtout pas prendre à gauche pour aller à Gorostapolo car ce n'est pas la route...
 

Jénorme à Gorostapolo (Espagne)
Siensienne et Jénorme se sont plantés de route
Photo : Le guide du plantard

 
Continues. Continues. Oui, voilà, très bien. Respecte la vitesse. Attention. Passes maintenant à Elizondo et regarde ses bars déprimants de bord de route, diffusant en boucle les exploits passés de Maradonna au FC Barcelone.
Atteints maintenant Mugaire qui se prononce comme le Mouguerre, jouxtant Bayonne.
Bordel : ils ne pouvaient trouver un autre nom !? C'est incroyable : tu passes la frontière franco-espagnol et tu retrouves les mêmes noms de villages d'un côté comme de l'autre de la chaîne montagneuse basque !
Continues... Continues un peu... Là, tu peux te perdre en loupant la route que tu devais prendre sur ta droite... Continues alors... Fais demi-tour un peu plus loin... Et, à un moment donné, débrouilles-toi pour trouver le petit village de Oieregi et son petit pont de pierre qui enjambe la rivière Baztan.
A ce moment là, et à ce moment seulement, tu peux sortir de ta voiture car, déjà, là, tu peux voir non loin du parking ce panneau t'indiquant que tu es arrivé au pied du domaine de Bertiz. Eeeh oui !
Ici, commence un parc naturel incroyable ! Enfin, d'après ce qui est dit dans les dépliants touristiques, les magazines et certains sites internet...
 
Je chausse le sac à dos et enfile les chaussures de marche. D'après le guide, il me faudra traverser plus de 5 heures de forêt...
Dans la forêt, je te retrouve
A l'heure opportune
D'un rendez-vous improvisé sous la lune
Sourire crispé, situation compliquée
...avant de rejoindre le but ultime !
Et quel est ce but ultime, me diras-tu. Eh bien, ah, ah, ah, ah, ah !!!!!
 
C'est parti ! Et voici ce que dit le guide à propos du chemin emprunté :
.
UN TOUR DANS LE BAZTAN

Carte_pays_basque_mag
Carte : Pays Basque magazine
 
"La Navarre est atlantique. ici, le moutonnement des montagnes noyées dans les forêts de chênes permet de fabuleuses randonnées en boucle, avec une incursion dans le parc naturel de Bertiz.
La boucle que nous vous proposons permet un circuit original autour du parc Senorio de Bertiz, un domaine de 2040 hectares, farouchement protégé depuis le XIXème siècle, selon la volonté de Pedro Ciga, seigneur de Bertiz..."
 
Alors, déjà, ici, on marque un temps d'arrêt puisque le magazine ne nous dit absolument pas qui était ce "Seigneur de Bertiz". Pour le savoir, il faut alors se reporter à la carte guide de Bertiz, fournie gracieusement et gratuitement par une jeune femme située dans une petite cabane à l'entrée de ce domaine. Domaine, rappellons-le (puisque c'est dit nulle part !) fermé par de hautes grilles en acier gris à partir de 18 heures. Nous avons donc ici un domaine préservé naturel fermé. Ne crois pas que tu vas aller ramasser des champignons ou aller écouter le brame du cerf à 5 heures du mat puisque le parc n'ouvre ses portes... ses grilles qu'à partir de 10 heures !
DONC oui alors, qui était Pedro Ciga, Seigneur de Bertiz ? Un ancien Roi ? Un mafieux ? Un ancien joueur de foot du Real Madrid ?
Oh que non !
.
La fabuleuse histoire de Pedro Ciga
Son histoire remonte au XIVème siècle. le premier propriétaire célèbre de ce domaine fut Pedro Miguel de Bertiz. Le Senorio s'est transmis de génération en génération jusqu'en 1884, année où Pedro Andrès de Oteiza, habitant de Narbarte, acheta la propriété et la donna à son fils Felipe Oteiza...
Putain, mais qu'est-ce qu'on en a à foutre de tout ce bordel ????
Finalement, en 1898, la propriété fut achetée par M. Pedro Ciga Mayo, dernier propriétaire particulier. A sa mort, en 1949, il légua la propriété par testament holographe à la Navarre, et en son nom à la Diputacion Foral, à condition de la conserver sans modifier ses caractéristiques. Ainsi, en 1984, le Senorio fut déclaré Parc Naturel.

Ceci étant dit, que peut-on voir dans cette immense propriété  ?
Eh bien, tout d'abord, un jardin botanique dont l'existence remonte à plus de 100 ans, le plus grand trésor du Parc Naturel.
Un réseau de sentiers vous permettra d'admirer plus de 120 essences différentes d'arbres et d'arbustes. Conçu par un jardinier français en 1847, Pedro Ciga l'agrandit ultérieurement en mélangeant des espèces autochtones à des essences exotiques. Parmi les premières, les hêtres sont les plus abondants et parmi les plus curieuses, citons le cyprès chauve, le cèdre du Liban, le gingko de Chine, l'araucaria de la Tierra de Fuego, le séquoia de Californie, le camélia, les azalées et les bambous. La beauté unique de ce paradis est rehaussée par des joyaux Art Nouveau comme les étangs, les ponts, les gloriettes, un belvédère Belle Époque et une chapelle joyaux.

Endroit par lequel nous ne passerons absolument pas !
Ben oui ! Je me suis planté de chemin à un moment donné et j'ai atterri complètement autre part !

IMG_0436
Photo d'autre part, c'est à dire le lieu où je ne devais pas aller

Mais ce n'est absolument pas grave car, déjà, les beaux sentiers parsemés de verdure s'ouvraient à moi.

Le parc naturel est sillonné par un bel enchevêtrement de chemins et de sentiers sinueux bordés par des grands arbres de tout type, de haies, d'arbustes et de massifs de fleurs. Il existe une importante représentation d'espèces autochtones ainsi que de très nombreuses plantes exotiques : liquidambars, ifs, hibas, cyprès des marais, cephalotaxus, ginkgos... Oui, c'est vrai, dit comme ça, ces plantes ont des noms de groupes musicaux et nous avons presque l'impression de lire l'affiche du dernier festival Rock en Seine de Saint-Cloud. Mais, en ce lieu, il y a aussi séquoïas, cèdres, citronniers, camélias, azalées, hortensias, glycines, bambous,...
On distingue une prédominance des hêtres. Ces arbres sont si efficaces dans la capture de la lumière que le starte herbacé et arbustif est peu abondant (fougères, bruyères, airelles, euphorbes, saxifrages, véronique,s graminées, ronces, genêts d'Espagne,...).
Parmi les espèces arborescentes, on peut observer des ifs, houx et bouleaux dispersés.
Plusieurs chênes se mêlent aux hêtres : le chêne commun, le chêne tauzin et le chêne sessile. Puis, une forêt moins dense permettant l'entrée de la lumière qui favorise l'apparition d'autres arbres tels que le noisetier ou le houx et le développement du stratus arbustif : fougères, joncs, lianes, bruyères, épines, airelles, fragons épineux, asphodèles et nombreuses herbes.
Le châtaigner est très abondant et se mêle aux autres arbres du bois sur toute la superficie du Parc Naturel.

.
EN BREF : Outre les essences locales, Bertiz abrite près de 150 espèces végétales du monde.
Notre itinéraire empruntera des sentiers de traverse et des cheminements de crête avant de rejoindre le palais d'Aizkolegi, construit au milieu de ce paradis, au sommet d'une butte de 841 mètres d'altitude, point le plus élevé du domaine.
Nous commençons la randonnée en longeant la Bidassoa. Tant qu'elle traverse la vallée du même nom, cette rivière est appelée Baztan depuis sa source à Errazu.
 

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Après 2H30 de marche, nous traverserons une belle forêt de chênes têtards aux formes fantastiques...
 

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Tu as vu ce dernier arbre ?
Majestueux aux formes étranges ! On dirait une main géante, paume ouverte pour recueillir le peu de lumière qui filtre à travers les feuillages.
Oooh, cela me rappelle ces photos que Gaëlle avait prise lors de son passage au lac de Pannecière il y a quelques mois. Elle aurait pu s'attarder sur ces paysages lunaires créés par la disparition du lac (pour cause de nettoyage).

 
 
Mais non, elle avait préféré s'attacher aux restes d'arbres et de tronc qui revoyaient le rivage et la lumière du jour après plus de dix ans passés sous l'eau.
 

Gaëlle

Gaëlle

Gaëlle
                                                                                   Photos : Gaëlle R.

 
Et puis, dans le détail, lorsque l'on se pose un peu pour regarder tout cela de plus près, aux sons de la forêt, que ne voit-on pas...
Quelque chose de complètement surnaturel ! Le travail de la nature, des années, des décennies, et pour des siècles et des siècles, amen.
Regarde un peu...

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Hein ? Oui, alors non !
Ce n'est pas seulement un arbre... Regarde un peu plus près...

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Ne dirait-on pas... un visage, hein ? Hein ? Hein ?
Un visage qui crie ! Un visage qui meure ! Un peu comme "Le cri" de Munch...

11 Munch 2
Image : Figuration/ défiguration


Mais si, bien sûr ! Allez, c'est évident !
Continuons à errer dans cette majestueuse forêt, exposant ses arbres tel un musée ses oeuvres d'art... Tiens, d'ailleurs, j'ai posé des titres sur chacun, comme ça, tu ne pourras pas dire que tu n'étais pas prévenu...

 

LA FORET, UN MUSEE ?

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La torche qui braille                          La niche qui fend  

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Ta tête dans le rhum

  IMG_0438   IMG_0413
  Capitaine Caverne au couscous                      Coiffure de Lynch après somnifère

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Le perchoir en plein vol

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Explosion du poumon                      Couple qui danse le salto

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Récite ton alphabet

 

Allez, sortons d'ici et allons franchir cette dernière rude montée de l'Irubagoeta (563m, 5h), avant d'attaquer celle d'Inarmeaka (645m, 5h30) ; puis celle de Paretaza (795m, 6h)... qui m'amène ENFIN au but : le palais d'Aizkolegi !
Pendant toute cette randonnée, je n'ai pensé qu'à lui. De multiples interrogations se greffaient à mon esprit pour entraîner mes muscles fatigués jusqu'ici !
Un palais... Un palais... Immense forteresse moderne aux multiples balcons et fenêtres... Architecture fantasque et original...

            Tel le Regaleira au Portugal
Regaleira1
                         Photo : Wikipedia

Le Paignton Oldway mansion,          
dans la campagne britannique         

Paignton_Oldway_Mansion
Photo : Wikipedia                                  

  Le palais de Ceausescu, en Roumanie
ROM03_041-palais-parlement
                              Photo : Fotoway

 
 Ou encore le fabuleux Palais Idéal du Facteur Cheval
palais idéal
Photo : Le voyage de Jénorme
 
Eh ben... euh... non !
Certes, on a une belle vue sur la vallée du Baztan... et encore faut aimer regarder la forêt vierge à perte de vue...

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Quant au palais, il est normalement inapprochable et en complète ruine...

 

LE PALAIS D'AIZKOLEGI

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Pas un bar à mojito ! Pas un vendeur de Churros ! Pas un écriteau retraçant la vie de l'homme qui avait vécu ici et avait donné vie au parc que je venais de traverser depuis plus de 7 heures. Espagne, pays fantôme.
Dans le même temps, je me demandais si je me serais rendu en ce lieu si j'avais su que le palais était une ruine...
Aucun regret finalement après avoir passé ces quelques heures en pleine nature.
Avant de redescendre dans la vallée, une pensée me revenait alors en regardant une dernière fois l'état de délabrement de cet établissement autrefois doux et accueillant :

Matérialisme

Le palais existait encore et le parc de Pedro Ciga accueillait plus de 200 000 personnes chaque année ; des gens venus pour être en contact avec uen nature préservée et éclectique.

De mon  côté, je m'en retournais à la voiture. Chemin inverse. Route inverse. retour à la frontière franco-espagnole.

 

danche_guideRe-passage à Danche... Dancharia... Dantxaria... Dantxarinea...
où, rappelons-le, il était toujours de bon ton de marquer un petit arrêt
pour boire un Martini...
Photo : Le guide du Danchard, à paraître bientôt prochainement

 

 

 

 

 

 

 Et puis, avant de regagner une maison, quelque part, sur une montagne, un dernier passage dans la forêt de Cherchebruit...

  

 

Sur ce, à plus tard... 

 

 

 

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