Pouilly-Fumé ou Pouilly-Fuissé, la suite (58)

Dans notre précédent épisode, nous avions entamé une petite randonnée tranquille dans les vignes  -non pas de Pouilly-Fuissé-  mais de Pouilly Fumé, c'est à dire à Pouilly-sur-Loire, dans la Nièvre.
Quand soudain, ne voilà-t-il pas...

Petit récapitulatif rapidos de l'épisode précédent que tu peux retrouvant en cliquant là-d'sus : Pouilly-Fumé ou Pouilly- Fuissé (58).
Mon père et moi, nous nous sommes rendus à Pouilly-sur-Loire pour nous lancer dans une petite randonnée-marche à travers les belles vignes de Pouilly-sur-Loire ; vignes auxquelles nous devons, entre autres, le fameux Pouilly-Fumé à ne pas confondre avec le Pouilly-Fuissé puisque ce n'est pas le même département, et donc pas le même vin.

Petit rappel important pour échauffer les papilles... les mollets : le Pouilly-Fumé se prénomme ainsi car "le raisin, à sa maturité, se recouvre d’une fine pruine grise, pellicule cireuse qui protège sa surface, semblable à un voile de fumée. L’autre explication est liée au terroir : fumé se rapporterait au fumet de pierre à fusil qui se produit quand les silex, très présents sur le sol de pouilly fumé, s’entrechoquent. Et c’est sans doute cette caractéristique qui donne une si bonne réputation à ses vins, cette note aromatique de fumée, très minérale, qui complète, voire supplante les parfums habituellement très fruités du sauvignon (citron, orange, pamplemousse)." LE MONDE

Nous sommes donc partis pour un peu plus de 3h15 de marche (si on ne se perd pas car le balisage de la randonnée n'est pas toujours clair) sur une distance de 13 kilomètres avec un dénivelé de 185 mètres.

TOUT DE SUITE,
LES CARTES !

Lors du précédent billet, nous avons marché non pas sur la lune,
mais sur une ancienne voie romaine qui, apparemment,
n'en était pas une puisqu'il s'agissait, en fait, de la Route n°8
qui reliait Paris à Lyon au XVIIIème siècle.

Puis nous avons traversé des hectares de vignes, sachant que le vignoble de Pouilly-sur-Loire s'étend sur plus de 1430 hectares.
Et ça, ça en fait de la vigne et DONC du raisin.
Et DONC du vin !

        

Tout au long de cette traversée, nous avons pu rencontrer des panneaux explicatifs sur les origines et l'exploitation de ces vignes bourguignonnes.
Nous avons également croisé quelques beaux panoramas sur les alentours, comme ces vues sur Saint-Andelain (village voisin), la Loire et Sancerre (l'adversaire).

Après ce vagabondage vignoblesque (si, si, ça se dit !), nous retrouvons pour un temps l'asphalte de la RD153 qui nous amène direct au charmant hameau des Loges.

ET HOP, L'AVENTURE CONTINUE...
Après une belle descente bitumée, nous arrivons à hauteur du panneau d'entrée du hameau.

 

Ah ben oui, on est content de voir un panneau de village puisque cela fait plus de 70 minutes que nous n'en n'avions pas vu un.
Non, je plaisante. En fait, si nous posons aussi fièrement devant ce panneau, c'est parce que... tu verras plus tard.

Attention : il ne faut pas confondre Les Loges dans la Nièvre avec Les Loges dans le Calvados, ou avec Les Loges dans la Seine-Maritime, ou même encore le camps des Loges en région parisienne, ancien centre d'entrainement du PSG.
Non, ici, c'est Les Loges, village vigneron... indépendant.

 

Et là, bien sûr, première question : qu'est-ce qu'un vigneron indépendant ?
Reprenons le travail et l'exploitation viticole.
Il existe 3 types de producteurs de vins :
-les négociants, qui achètent le raisin ou le jus de raisin non fermenté pour le transformer en vin et le vendre sous leur propre marque
-les coopératives, des groupements de vignerons d’une même zone de production qui vont produire des cuvées grâce à l’ensemble des récoltes des différents adhérents
-le vigneron indépendant, qui travaille son raisin, son vin et sa commercialisation tout seul, sans négoce ou coopérative.

"Pour être vigneron indépendant et obtenir le fameux label, le vigneron doit respecter une charte qui stipule qu’il :
-respecte son terroir,
-travaille sa vigne,
-récolte son raisin,
-vinifie et élève son vin,
-élabore son eau de vie (le cas échéant),
-met en bouteille sa production dans sa cave,
-commercialise ses produits,
-se perfectionne dans le respect de la tradition, 
-accueille, conseille la dégustation et prend plaisir à présenter le fruit de son travail et de sa culture.
Responsable, le vigneron indépendant assure donc en totale autonomie la qualité de ses vins dans le respect de l’environnement et de ses sols. D’autre part, les médailles décernées au Concours des Vignerons Indépendants sont un véritable gage de qualité et reconnues dans le monde du vin." AVENUE DES VINS

Voilà ! Ceci étant dit, descendons la rue principale du hameau pour rejoindre-traverser le centre-bourg. Et cette rue principale  -et presque unique- se prénomme Rue Saint Vincent, patron des vignerons.

"Il se nommait Vincent Palotti, né à Huesca en Espagne ; ce qui lui donnera plus tard le nom de Vincent de Saragosse. Il fut instruit dans les saintes lettres par Valere évêque de Saragosse. Ordonné diacre et arrêté, parce que chrétien, sur l’ordre de Dacien, préfet de Saragosse, il subit de terribles tortures. Fortifié par la grâce divine, il gardait un visage radieux et murmurait : "Je pensais que votre cruauté irait plus loin". Il fut, comme Saint Laurent, étendu sur un gril posé sur des charbons ardents, avec du sel répandu sur ses plaies pour augmenter sa souffrance. Les yeux levés vers le ciel, il s’entretenait avec son Créateur. Le gouverneur Dacien le fit ramener dans sa prison, qui fut inondée de lumière et d’une musique célestes. Le geôlier et ses compagnons se convertirent devant ce miracle. Dacien, furieux, essaya de rétablir la santé du martyr pour de nouveau le faire souffrir. Alors le Saint expira en 304." BRETVINS.COM

C'est ici, aux Loges, que je suis venu deux années de suite faire les vendanges dans les années 1990.
C'était chez Guy Baudin qui, aujourd'hui, travaille avec ses fils.

Tu peux retrouver toutes les infos sur cette famille de vignerons, dont l'origine de l'activité remonte à 1865, sur le site : Domaine Baudin et fils.
On reparle également, entre autres, du phylloxéra (puceron dévastateur originaire d'Amérique) qui, à la fin des années 1880, fit beaucoup de dégâts dans le vignoble. Les parcelles furent arrachées pour être regreffées avec un porte greffe américain.
J'ai passé de bons moments dans les vignes lors des vendanges chez Guy. Il possède plusieurs parcelles à différents endroits (11 hectares de vignes en tout), ce qui lui permet d'avoir une grande variété de sols, dont la majorité des sols sont argilo calcaire. Il possède également des marnes roches sédimentaires avec petits coquillages et des cris, avec des zones de silex. Ceci lui permet d'avoir des vins variés, aux arômes différentes, et toujours cultivés et récoltés dans le respect de la nature. Il vendange toujours 100% manuellement.
BREF : v a sur le site pour avoir plus d'informations sur l'histoire, la culture et la vinification du vin, ainsi que les prix des différents vins que le domaine propose, ainsi que les tarifs pour leur gite.

Alors, Les Loges, village de vignerons indépendants.
Tout d'abord, l'origine de ce nom provient des petites constructions typiques des vignobles. Ne pas confondre avec la loge aux moines qui désigne le petit vallon cultivé dès le XIIIème siècle par les moines chartreux de Bellary (lieu-dit situé à une quinzaine de kilomètres). La production de ces moines approvisionnait en vin la maison de la Loge aux Moines à Pouilly, réservée aux pèlerins. C'est ainsi qu'un peu plus tard Les loges, petites constructions utilitaires typiques des vignobles, ont donné leur nom au hameau de vignerons voisin.
"Le vignoble de Pouilly sur Loire semble attesté pour la première fois au Vème siècle sous la forme de 'Pauliacum super fluvium ligerim'. Comme pour beaucoup de vignobles français, son véritable essor est dû aux congrégations religieuses, en particulier celle des Bénédictins, qui cultivèrent la vigne, dont une parcelle de 4 hectares, qui surplombe la Loire et porte toujours le nom de Loge aux Moines." GUY BAUDIN

Les maisons des Loges sont typiques du XIXème siècle. Elles sont par leur escalier qui enjambe la cave et permet ainsi d’accéder au rez-de-chaussée. Bâtie en premier, la cave était fondamentale ; l’habitat surélevé en fonction des contraintes de celle-ci. C'est ainsi que la cave semi-enterrée permettait une bonne conservation du vin.

C'est un véritable défilé d'exploitants que nous propose la descente de la rue Saint-Vincent.
"Mais tous ces autres exploitants, à commencer par d’autres Pabiot, ce n’est pas un peu la concurrence ?", demande David Genestal à Jérôme Rabiot, récoltant aux Loges.
"Pas vraiment. On se connaît tous aux Loges. On a grandi ensemble. C’est très soudé. On a chacun nos domaines mais ça ne se tire pas dans les pattes. Au contraire même, le collectif répond présent quand l’un de nous a des problèmes avec sa vigne ou a besoin d’un coup de main. C’est très solidaire."
Un entretien à retrouver sur le site de David Genstal : CARNETS DE RANDO.

À l'époque des premiers vignerons, le village s'ouvrait entièrement sur la Loire qui coule en contrebas, et au bord de laquelle était installé un port, tout comme à Pouilly et à Charenton. De là partait sur les embarcations la production des vignes.

Nous découvrons également quelques maisons à l'abandon ou/et à vendre.

    

     

Nous croisons également un chemin végétalisé au nom intrigant.

Ce chemin des Nues, situé en haut du village, est l'ancienne route des diligences, qui s'appelait "le chemin de la Mariée".
Ce chemin reliait les Loges à Pouilly car, au bord du fleuve, il n'y avait qu'un chemin de halage, les vignes descendant jusqu'à la Loire. C'est donc par ce chemin qu'on se rendait à l'église depuis le village vigneron.

Un peu plus bas, la place centrale appelée place des Cigales, est bien vide. On y trouve un petit panneau informatif sur lequel sont affichés... deux avis de décès.

      

En face, une grande porte avec une affiche publicitaire en métal.

En cette fin de mois d'août, les vendanges se préparent silencieusement.
Certains viticulteurs ont déjà reçu les bouteilles vides censées abriter la future récolte.

Dans le bas du hameau, nous voyons le pont de chemin de fer sur lequel passent les trains allant ou venant de Paris, entre autres. Juste derrière le pont, il y a la garnde route qui s'en va sur Cosne-Cours-sur-Loire.
Nous, nous restons dans le bas du village en tentant de répérer les traits de balisage.

Je vois une charmante petite boite aux lettres.

Ainsi qu'une grande maison recouverte de feuilles de lierre.

Un peu plus loin, une étrange combinaison motorisée qui me fait penser que cela doit être compliqué de partir en vacances.

Un peu plus bas encore, une rue au nom bien nommé.

 Les "Côtes rôties". Cela m'a toujours intrigué comme nom pour un vin. En même temps, il est élaboré dans les Côtes du Rhône, sur les communes d'Ampuis, de Saint-Cyr-sur-le-Rhône et de Tupin-et-Semons, sur la rive droite du Rhône, en face de la ville de Vienne, au sud de Lyon. OK pour "Côtes", mais pourquoi "Rôties" ?
Eh bien, parce que ce vignoble, à l'extrémité septentrionale de la vallée, bénéficie d'une orientation sud/sud-est. Les vignobles de Côtes Rôties sont caractérisés par des sols en pente et des murs en pierre. Son nom renvoie donc à l'exposition dont bénéficient ces sols en pente. Cela en fait un des crus les plus prestigieux de la vallée du Rhône.

En suivant cette rue montante des Côtes Rôties, nous sortons du hameau pour nous retrouver à nouveau sur un chemin de vignes. Derrière nous, un magnifique panorama sur les toits des maisons des Loges apparait.

C'est également sur ce chemin qu'a été prise une ancienne photo pour une carte postale des Loges il y a quelques décennies.

Carte : Au pays de mes ancêtres

C'est ici que nous décidons de faire
notre pause pique-nique.

Ah ben oui,
c'est pas la même carte postale là !

Derrière nous, les vignes et leurs grappes.

Devant nous, un autre panorama sur la butte sancerroise.

Et c'est en voyant cette butte voisine, mais "concurrente" que me reviennent les mots de Georges Blanchard, poète patoisant nivernais avec son poème "L'vin d'Pouilly" : 

Pouilly, si ton nom vagabonde
Jusque dans les pays pardus,
Si t'es connu
du bout du Monde,
Té l'doué au jus d'tes pieds tordus.

Té l'doué au
soleil, à la terre,
A tout s'qui dounne à ton raisin
Un sacré foutu
caractère
Qui I'fait différent d' son vouésin.

Après cette petite pause, nous reprenons notre chemin.
Plus un signe de balisage. Nous continuons de façon aléatoire en franchissant un petit vallon avant de remonter un peu. 

En bord de sentier, plus de raisin, mais des mûres.

On se dit que si nous nous perdons, nous aurons au moins quelque chose à manger.

Le chemin-sentier aboutit finalement dans un autre lieu-dit, les Girarmes. On a un peu rien à faire ici. En gros, on s'est légèrement planté d'itinéraire lorsque nous regardons la carte de randonnée.

Nous cherchons un balisage, un indice en trainant dans le hameau, composé de deux rues : "Rue des coteaux" et "Rue des petits cris". 

Il y a quelque chose d'étrange quand tu fais une randonnée et que tu te perds... tu t'égares.
Cela m'est arrivé plusieurs fois en montagne. Par exemple, ce jour où je me suis planté de vallon pour rejoindre la lac d'Isabe, en vallée d'Ossau (cf : A la recherche du lac d'Isabe). Tu es sûr de ton itinéraire, tu rationnalises et puis, à un moment, il faut bien te l'avouer à toi-même : tu t'es planté !

Toutefois, le lieu où nous nous trouons mon père et moi ce jour là ne m'est pas inconnu. Une sensation de déjà vu, comme on dit. Mais pas sous la forme de paramnésie...

PARAMNESIE, définition
Néologisme formé sur le modèle de amnesia « absence de souvenir, oubli » à partir du grec para « à côté » et mnesis « mémoire, souvenir ».
L'impression d’avoir déjà vécu une situation ou d’en avoir déjà été témoin, accompagnée d'une sensation d'irréalité, d'étrangeté.
L'expression "Déjà-vu" a été créée en 1876 par le philosophe français Émile Boirac (1851-1917). Le déjà-vu est une expérience intime et personnelle, qui ne peut être jugée ou partagée par autrui. Le sujet a le sentiment de reconnaître une situation présente nouvelle comme familière (déjà vue), tout en ayant conscience que c'est impossible (le « déjà-visité » au cours d'un premier voyage, par exemple). Ce qui engendre une perplexité qui peut aller jusqu'à l'anxiété.

Suis-je vécu d'un déjà-vu ? Rue des Petits cris, cela me rappelle quelque chose... Non pas un film d'horreur ou autre...
Je cherche dans les méandres de ma mémoire, quand soudain, le déclic ! Mais oui bien sûr ! C'était en décembre 2021.

Eh oui, j'étais venu ici pour rendre visite à Amélie et au Toine, qui ont une maison juste devant la sortie du sentier, là où se trouve également cette croix énigmatique. 

 

Comme c'est écrit sur le socle porteur en pierre, elle fut "érigée" par la comtesse de Laubespin qui en fait don en 1877.

Tout ça, c'est bien gentil-joli, mais cela ne nous remet pas sur le droit chemin ; même si nous savons où nous sommes à présent.

Tentons de retrouver l'itinéraire, ou du moins, un itinéraire afin de retrouver Pouilly-sur-Loire sans revenir sur nos pas.

Nous descendons la rue des Coteaux pour, finalement, arriver au bord de la Loire.

       

Bon... C'est pas par là.
Finalement, nous décidons de nous désolidariser des balisages jaune-blanc-rouge aléatoires et pourtant censés nous guider pour cette randonnée.
Armé de la boussole du téléphone portable, nous remontons les Girarmes par la rue des Coteaux pour tenter de rejoindre une autre route principale, la D553A, qui devrait ensuite nous permettre de rattraper l'itinéraire initialement prévu.

Tout autour de nous, de la vigne !
A droite, à gauche, au milieu, devant, derrière !!!!

ET DU RAISIN ?!!!
MAIS OUI, Y'EN A DU RAISIN !!!

Et puis soudain, là-bas au loin, un phare dans la vigne, un éclair dans la nuit, un clocher dans le raisin...

Oui !
Mais bien sûr :
c'est le clocher de l'église de Saint-Andelain !
Là-bas, au loin !

Nous avons retrouvé l'itinéraire de notre carte originale. Bon, il faut dire que la carte en question est extraite d'un livre de randonnées qui date de 2003.
Eh oui, ça fait 20 ans.

Nous marchons encore un temps sur la RD553A. A certains endroits, la vigne s'est octroyée quelques couleurs autres que le vert ambiant.

       

C'est mignon, c'est choux, mais surtout c'est utile pour les viticulteurs.
En effet, si en bout de rang de vigne, on trouve ces rosiers des vignes, c'set pour permettre au viticulteur de détecter naturellement les contaminations de certaines maladies de la vigne. Ces rosiers sont sensibles à des souches de maladies ou d'insectes similaires ou identiques à ceux de la vigne, ils peuvent donc parfois prévenir plus tôt de certaines attaques par des organismes ravageurs de la vigne.
Il est vrai que depuis quelques décennies avec l'amélioration du système de détection des maladies de la vigne, ces rosiers les rosiers sont également restés pour remplir une fonction esthétique.

Un peu comme ce lanceur de disque en plâtre
dans le jardin du domaine de la Moynerie...

Nous continuons un temps sur la RD553A, appelée tour à tour Route des Coteaux de Pouilly-Sancerre, puis Route Bleue, en référence bien sûr à l'ancien tracé de l'ancienne Nationale 7.

      

C'set à partir de là que nous avons retrouvé l'itinéraire de randonnée prévue au départ? C'set également là que nous avons constaté qu'il ne fallait plus suivre le balisage rouge-blanc-jaune, mais le balisage Bleu, refait pour l'occasion.

Nous prenons sur la droite pour passer sous un pont sur lequel passe l'A77, autoroute de l'Arbre, reliant Paris à Nevers.
Petite montée, virage à gauche et nous entrons dans le village de Saint-Andelain. Et non, contrairement à ce que tu peux peut être penser : ici, on ne fait pas du Saint-Andelain fumé, mais bel et bien aussi du Pouilly-Fuissé... non, du Pouilly-Fumé... entre autres.

"Le vignoble de Saint-Andelain fut le plus prompt à se reconstituer après la terrible crise phylloxérique de la fin du XIXe siècle. Ce nouveau départ eut pour base l’opiniâtreté de nombreuses petites exploitations familiales qui, après s’être tournées momentanément vers d’autres productions, vont retrouver parcelle après parcelle, la culture de la vigne comme activité principale.
Saint-Andelain demeure à ce jour, la commune la plus plantée de l’aire d’Appellation d’Origine Contrôlée : Pouilly-Fumé et Pouilly sur Loire.
Le terroir de Saint-Andelain se compose principalement de marnes à petites huîtres (kimméridgien) et d’argile à silex (crétacé). Ce dernier terroir, principalement présent sur les hauts de la « butte » andeléenne, propose des vins de grande typicité." Patrick Coulbois pour Saint-Andelain.fr

C'est à Saint-Andelain, que je découvre la seule exploitation arborant ce beau "slogan" de domaine familial...

Eh oui : "Dagueneau et filles". Ça change.
Que dire sur Saint-Andelain ?
Quand on s rend sur le site officiel de la ville, on apprend que la Saint-Vincent, patron des vignerons, est fêtée chaque année le 22 janvier. Messe, cortège et portage de la statue de Saint-Vincent. Originalité par rapport aux autres communes vigneronnes, la statue de Saint-Vincent de Saint-Andelain est la seule au monde à être en faïence de Nevers.
rappelons vite faite la légende de Saint-Vincent dont nous avions parlé dans l'épisode précédent : "La légende veut qu’il aurait été torturé sur une roue de pressoir ou qu’il aurait supporté stoïquement son supplice parce qu’il avait bu du vin avant cela. Ce serait pour ces raisons qu’il serait devenu le saint protecteur des vignerons."

Autre légende courant sur la géographie de Saint-Andelain, celle liée à Gargantua :
"La colline est répertoriée dans les sites gargantuesques comme « dépatture » du géant rabelaisien.
Ainsi la butte locale devrait son élévation au fait que, harassé après une longue et pénible marche, Gargantua se serait assis et aurait décrotté ses bottes de part et d’autre de la Loire, constituant ainsi le piton de Sancerre et la colline de Saint-Andelain." SAINT-ANDELAIN.FR

Nous traversons Saint-Andelain avec, en point de mire, l'incontournable église Saint-Léger, érigée au XIXème siècle, sur l’emplacement de la précédente église déjà vouée à saint Léger. 

Ben oui, là aussi, y'a de la vigne !
Nous e montons pas jusqu'à l'église. Le balisage bleu nous propose de tourner sur notre droite en suivant la rue des Bois. Un peu plus loin, une autre intersection nous invite à prendre sur notre gauche au niveau d'un carrefour original, baptisé "Espace André Rapeau", marqué, au premier regard par un poteau-girouette géographique.

      

Ce petit endroit discret est aménagé avec une fontaine, des fleurs, des petits objets, des poèmes...

Et le fameux pot aux roses...
poteau rose.

Juste derrière, un bar à toutou pas banal, et qui rappelle qu'il n'y a pas de vin dedans.

         

Nous quittons une nouvelle fois l'asphalte pour emprunter un chemin herbeux passant à proximité des vignes. Nous vérifions tout de même que nous sommes bien sur le bon itinéraire et que le balisage bleu est présent.

Avec en point de mire, toujours,
le clocher de l'église de Saint-Andelain
qui semble nous observer par dessus les vignes.

Un peu plus loin, au nord, deux grosses cheminées blanches sortent de la ligne d'horizon...

C'est la centrale nucléaire de Belleville-sur-Loire.

Le sentier de traverse tombe sur la  D153 (ben oui, encore elle !) ; non loin du château d'eau aménagé en belvédère.

Etant la commune la plus haute perchée sur la rive droite de la Loire, cette situation géographique avantageuse est à l’origine de la création du Belvédère. 

Au XIXème siècle, on pouvait voir jusqu'à 23 clochers depuis Saint-Andelain, d'où les 23 festons présents sur la bordure engrelée du blason de la ville.
A la même époque, c'était un moulin qui dominait les lieux. Celui-ci malaxait l'argile pour la fabrication de tuiles. C'est en 1957 que fut érigé un château d'eau pour alimenter la ville. Puis, une fois restructuré, le château d'eau sert aujourd'hui de belvédère.
Pour y accéder, il faut passer un portillon automatisé après avoir payé par carte bancaire la somme de 2 euros. Du haut de l'édifice, le panorama nous offre une vue de la Loire à La Charité jusqu'aux vallonnements du sancerrois.

Nous passons.
Au rond-point de la D153, nous prenons sur la gauche pour descendre en direction du château du Nozet, domaine de La Doucette.

      

Très beau château qui ne se visite pas. Par contre, tu peux aller y acheter du vin.
"Depuis la fin du XVIIIème siècle, la famille des Comtes Lafond possède le plus important et le plus réputé des vignobles de Pouilly Fumé. Le Baron Patrick de Ladoucette, arrière petit fils des Comtes Lafond, a perpétué cette tradition de très grande qualité et produit ce grand vin blanc de Ladoucette, référence mondiale des sauvignons. C'est en effet au siècle des Lumières que la célèbre famille des Comtes Lafon fit l’acquisition d’un vignoble à Pouilly-Fumé et y produit son vin : Pouilly Fumé Ladoucette. Patrick de Ladoucette, Baron de Ladoucette, agrandit le vignoble en achetant Le Clos de La Poussie à Sancerre. De Ladoucette est un domaine qui a plus de deux siècles d’existence. (...)" LILOVINO

Nous contournons le domaine par un chemin avant de rejoindre la D503 qui longe cette fois-ci, non pas des vignes, mais des champs de tournesols.

Avec cette chaleur, on peut remarquer qu'ils ne sont pas bien en forme. Mais apparemment, c'est normal.

 

Leur apparence me fait penser aux extraterrestres de "La Guerre des mondes" de 1953, réalisé par Byron Haskin, adapté du roman d'H.G. Wells.

       

Oui, d'accord, avec un peu d'imagination, mais bon.

Par contre,
ne nous y trompons pas...

...le vin de Pouilly n'est pas fait
avec des graines de tournesols. 

Avec la présence de ces centaines d'hectares, nous pouvons alors nous demander si nous sommes encore sur le bon itinéraire de randonnée dont le titre est, rappelons-le : "De Loire en Vignes".

Nous arrivons à un embranchement entre asphalte et chemin de terre...

Un panneau nous rappelle une nouvelle fois l'origine et la qualité des cépages de Pouilly-sur-Loire. En dessous, une flèche bleue nous invite à suivre le chemin de pierres et de terre.
Celui-ci s'en va descendre dans un vallon pour ensuite suivre en parallèle l'A77. Bon, ce n'est pas le moment le plus agréable de la randonnée. Nous sommes passés du silence des vignes aux bruits de la circulation routière.

Nous arrivons à un pont sur lequel passe l'autoroute. Nous passons en-dessous pour nous retrouver à Pouilly-sur-Loire. Retour à l'urbanisation. Une urbanisation silencieuse. Nous passons de rues en rues pour rejoindre la voiture.
Nous sommes loin de l'effusion des salons de dégustations, dont on peut retrouver un extrait dans le film de Roy Boulting, "Une fille dans ma soupe" (1970), avec Goldie Hawn et l'excellent Peter Sellers.

Un bien étrange titre ! S'expliquerait-il d'avantage en prenant connaissance du synopsis ?

L'HISTOIRE :
Robert Danvers est un chroniqueur gastronomique à la mode qui règne sur le tout Londres en matière de bonne chère et de vins fins. Ses articles, ses guides, ses émissions de télévision lui valent une popularité et des succès féminins qu’il apprécie en connaisseur, plus soucieux de varier les plaisirs que d’approfondir une passion. L’irruption de Marion, une gamine de 19 ans, dans son petit monde feutré, c’est celle de la pop music dans un concerto de Chopin, c’est le snack chez les snobs. C’est surtout une jeunesse irrépressible qui va bousculer les habitudes, le style de vie et le mode de pensée d’un quadragénaire raffiné...

Bon, d'accord.

Nous retrouvons le centre-ville de Pouilly-sur-Loire et notamment cette ancienne pharmacie.

C'est la fin de cette petite charmante randonnée à travers vignes.
On se quitte avec les mots poétiques d'Achille Millien (1838-1927), poète et folkloriste nivernais.
Voici un de ses poèmes qui parle, évoque, illustre les vendanges et la vie à Pouilly dans les vignes : "Le Pouilly qui nous donne franc coeur et bel amour".

"Sur les coteaux qui voient la Loire
De Pouilly refléter les murs
La vigne étale dans sa gloire
Les ceps chargés de raisins murs,
Et les tonneaux et les feuillettes
Sont tous prêts à les recevoir
Allez cueillir, garçons, fillettes,
Le raisin qu'attend le pressoir !

Il s'en vont en colonne
Dés la pique du jour ;
Ils vont mettre en la tonne
Le Pouilly qui nous donne
Franc cœur et bel amour !

       

Voici les tines déchargées :
Le vigneron rit de les voir
Au bord de la vigne rangées.
Elles seront pleines ce soir
De ces grappes amoncelées
Aux grains clairs comme du vermeil,
Purs comme des perles gonflées
De la lumière au soleil.

Plus d'un chariot sonne,
Roule avec un bruit sourd,
Apportant mainte tonne
Pour le Pouilly qui donne
Franc cœur et bel amour !

      

Du pied des côteaux jusqu'au faite
Eclate un tumulte joyeux :
Les jeunes gens ont l'âme en fête,
L'entrain s'éveille au cœur des vieux.
Pendant qu'on s'anime à l'ouvrage,
L'Amour malin rôdant par là,
Amorce plus d'un mariage
Que le vin nouveau scellera.

Gait ! le raisin foisonne
Et chacun en discourt :
"Mettons-le dans la tonne
Ce Pouilly qui nous donne
Franc cœur et bel amour !"

       

On écrirait tout un poème
Avant d'avoir bien exprimé
Le fin bouquet le goût suprême
Et la vertu du Blanc-Fumé.
C'set ainsi qu'il ne faut qu'un verre,
O bon Nozet, de ta liqueur,
Pour dissiper l'humeur sévère
Et mettre l'allégresse au cœur !

Au soleil qui rayonne
Fond la brume alentour.
Videz-le dans la tonne
Ce Pouilly qui nous donne
Franc cœur et bel amour !

       

Qui ne connait le cru des Loges
Entre tous ceux dont on fait cas,
A qui s'adressent les éloges
Des gourmets les plus délicats ?
- Et quand on dit : Côte-Rôties,
il suffit de citer ce nom,
Nul besoin d'autres garanties :
La meilleure, c'est le renom.

Bon vigneron, chantonne
La douceur de ce jour,
En portant dans la tonne
Le Pouilly qui nous donne
Franc cœur et bel amour !

       

Mais du repas l'heure est venue ;
Hors de la vigne groupez-vous !
L'herbe sèche, la terre nue
Voilà des sièges prêts pour tous.
Le pain bis, la noix verte encore,
Le fromage, un verre de vin...
Fin régal que vite on dévore,
Et le repos suit le festin.

Le coup de midi sonne
A la cloche du bourg :
Laissez, laissez la tonne
Du Pouilly, qui nous donne
Franc cœur et bel amour !

Avant de reprendre l'ouvrage,
Jeunesse, allons, chantez, sautez !
La fête est dans l'air : le plus sage
S'abandonne aux folles gaités.
On jase, on rit, gare les filles !
On les divertit... hardiment
Et l'on vanne les plus gentilles,
Comme l'on vanne le bon froment.

On plaisante. personne
Ne veut demeurer court.
Alors qu'on met en tonne
Le Pouilly qui nous donne
Franc cœur et bel amour !

      

L'amour qui veille et rit sous cape
Ne peut trouver un cas meilleur
Pour tendre quelque chausse-trappe
Afin de prendre un jeune cœur.
La fraiche idylle qui s'engage
Devant le chasselas doré
Finira par un mariage
Devant le maire et le curé.
Le galant qui s'adonne
A faire ici sa cour
Néglige un peu la tonne
Du Pouilly qui nous donne
Franc cœur et bel amour.

Maintenant, Côtes bien connues,
Coulez sous la vis du pressoir,
Bernada, les Bas-Coins, les Nues,
Les Cornets,  -du matin au soir.
C'est la Loge aux Moines, la Prée,
Les Foltières, et Vourigny :
Pour citer tout ce qui m'agrée,
Il faudrait nommer tout Pouilly.

Déjà le vin bouillonne,
La nuit comme le jour,
Déjà chante en la tonne
Le Pouilly qui nous donne
Franc cœur et bel amour !"

ACHILLE MILLIEN

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[FANFG]

Je n'ai pas résisté à inséré ton blog sur mon FB!!! Comme j'aime l'histoire/géo, je me régale à chaque fois!!!Bisous Fan